Vendu par M6 comme sa série de l’été, Marathon, le producteur, mettait de son coté en avant le fait que « Suspectes » [1] avait de quoi devenir une série régulière, avec de nombreux épisodes chaque saison. Reste à savoir si on en a envie.
« Suspectes » se base sur un canevas à la « Desperate Housewives ». Dans la série de Marc Cherry, le suicide d’une voisine du quartier servait, en même temps que de mystère initial, d’élément déclencheur à la série tout entière qui s’attache depuis à dévoiler les secrets que cachent les vies apparemment lisses des femmes au foyer de Wisteria Lane. Dans « Suspectes », c’est une tentative de suicide qui ouvre également la série. Une jeune femme se jette de la fenêtre de son hotel, avec sur elle un revolver et une liste écrite de sa main de quatre noms de femmes. La première est déjà morte, les trois autres sont peut-être en danger immédiat. Ces trois femmes, une mère au foyer modèle, une chirurgien esthétique cynique et une jeune ingénue qui travaille dans les cosmétiques, ne se connaissent pas. Le lien mystérieux qui les unit a tout à voir avec les secrets qu’elles cachent...
L’un des problèmes de la série est d’ailleurs qu’alors que ses héroïnes viennent de faire connaissance dans des circonstances qui plus est un peu troubles, elle les montre se comporter comme des copines dès le second ou troisième épisode, l’une demandant à l’autre d’aller chercher les gosses à l’école, voire de lui prêter... 20 000€. C’est d’autant plus implausible que les scénaristes se sont appliqués à rendre leurs trois héroïnes aussi différentes possibles l’une que l’autre, ce qui a pour effet de les pousser vers la caricature (le personnage d’Ingrid Chauvin est assez insupportable, et le portrait de sa vie de ménagère d’une lourdeur infinie). Seule Karina Lombard semble parvenir à maintenir la note juste au fil de ses scènes. La formule des épisodes tente également de reprendre à « Desperate Housewives » sa balance entre la comédie et un mystère policier à suspense. Il n’en reste malheureusement pas grand-chose dans les faits. Les maux de « Suspectes » sont assez communs. Un rythme très poussif (le premier épisode est interminable), des dialogues explicatifs et ampoulés, des invraisemblances énormes, tel que le policier qui décide de laisser les photos de la victime à terre sur les lieux de son suicide aux héroïnes, ou encore une direction d’acteur inexistante qui pousse bien des séquences comiques dans le mauvais goût. Des défauts qui s’imposent d’autant plus que le mystère peine à intéresser. Alors on a beau trouver ça et là une scène réussie, une séquence vraiment drôle, cela ne suffit pas à permettre d’adhérer à cette série bien poussive.
La conclusion des huit épisodes a l’avantage d’être relativement inattendue et intéressante, même si elle est un peu plaquée. En cela, et parce qu’elle ne vient pas comme l’aboutissement d’une construction logique — les multiples fausses pistes apparaissant finalement comme des gagne-temps — elle ne récompense pas très bien le téléspectateur qui a suivi la série. Le sentiment de résolution est minimal. Surtout que cette « fin » constitue d’abord, et avant-tout, une gigantesque porte ouverte vers une suite. Elle amène d’ailleurs immédiatement un cliffhanger final qui manque grandement d’élégance.
Aux États-Unis, on appelle cela ’’Promotional Spin’’. Ça consiste à tordre les faits de manière à en faire une communication très positive, et tant pis si la dite communication n’entretient plus qu’un rapport assez distant avec la réalité.
Récemment, France Télévision tenait une conférence de presse pour annoncer sa grille d’été. Le message du jour : cet été sur France Télé, ce serait du 100% inédit, 100% événement. Un message repris comme un seul homme par les journalistes, depuis la presse télé jusqu’au Monde Télévision. Visiblement, ça n’a frappé personne de se retrouver à annoncer quelques pages après le compte-rendu de cette conférence une rediffusion de la première saison de « Clara Sheller » sur France 2, et l’énième reprogramation de « Suzie Berton » sur France 3, sans parler de la mini-série « L’enfant de personne » ou des téléfilms du jeudi sur France 3. Entendons-nous bien, il y a parmi celles-ci des productions de qualité, particulièrement « Suzie Berton », et il n’est pas indigne de proposer aux téléspectateurs de les (re-)découvrir. Mais c’est aussi sans aucun doute du déjà diffusé, rediffusé, et sorti en DVDs. Soit le mot inédit a changé de définition, soit on cherche à nous faire prendre des vessies pour des lanternes.
Mais le bouquet final a été atteint quand, au milieu de cet été 100% inédit, on annonce sur France 4 la diffusion de la série « Bugs ». Une série anglaise dont la première saison date de 12 ans et qui fut déjà diffusée sur M6 en... 1999. L’absence de mémoire télévisuelle constitue-t-elle la nouvelle frontière de l’inédit ?
On s’étonne quelque fois de ce que les journalistes politiques gobent sans broncher les plans com’ de leurs invités. On constate donc avec intérêt que les journalistes médias et Arlette Chabot ont visiblement bénéficié de la même formation...
« Ici, il y a des enfants sans mères et une mère sans enfants. » C’est ainsi que Violette explique à Victor, 17 ans, la configuration de cette ferme dans laquelle il va passer l’été. Violette est une jeune veuve. Victor, délaissé par sa mère qui l’a eu à 17 ans, cherchait un travail pour l’été ; depuis la mort de son mari Violette, a besoin de quelqu’un pour l’aider à la récolte des fraises. La maison n’est pas vide, puisque Angèle et Colette, deux jeunes filles de l’âge de Victor, viennent depuis trois ans passer ici l’été et s’éloigner de l’orphelinat dans lequel elles grandissent.
Connu pour son travail au cinéma, Manuel Poirier (« Western ») réalise avec « Le sang des fraises » [2] un téléfilm qui tranche avec l’habitude, seulement en cela qu’il transpose sans modification à la télévision le canevas habituel du film d’auteur à la française. On y retrouvera donc les qualités et les défauts de ce cinéma-là. Les amateurs apprécieront, les autres sombreront probablement dans un ennui douillet. De jolis portraits, peints avec subtilité, sont sans conteste la réussite du « Sang des fraises ». On notera aussi de jolies trouvaille de casting : Baptiste Caillaud, subtil, à la fois hanté et chaleureux et Cécile Rebboah, très naturelle et récompensée pour ce rôle au festival de St Tropez. A l’opposé, Céline Crémon nous propose un jeu plat d’une grande fadeur, et Marion Durand nous fait la caricature de la gouailleuse sexy franchouillarde. Par ailleurs, le portrait social n’évite pas un certain misérabilisme et ne comporte guère d’originalités, voire enfile certains clichés, telle que la scène de Violette se contemplant nue dans la glace, tellement mille fois vue qu’on ne voit pas ce qu’elle peut encore apporter. Et si le film intéresse par sa mise en scène des non-dits et des silences, il offre un visuel pauvre, notamment sur le plan de la photographie, inexistante. Pour les « auteurs » français, il n’y a visiblement toujours pas d’esthétisme qui ne soit pas esthétisant.
Ces dernières semaines, « Plus belle la vie » a perturbé la mécanique bien huilée qui la régit habituellement. Depuis septembre 2006, les histoires principales de la série durent deux mois (c’était trois auparavant). Après la fin de l’intrigue de mars - avril, une intrigue a pris le relais, liée au personnage mystérieux de Vassago, qui prétend être le père de Céline Frémont. Au bout d’un mois, l’intrigue en question a mis Céline en prison et Charles Frémont en hôpital psychiatrique. Juliette Frémont a commandé un test de paternité pour en avoir le coeur net, réalisé en Angleterre avec un délai de trois semaines. A la faveur de cette mise en attente, cette intrigue s’est éclipsée pour laisser la place à une nouvelle intrigue principale qui dure depuis. La fameuse intrigue qui met en avant la chanteuse Maïdi Roth, dont une chanson est appelée à devenir celle de l’été sur France 3. C’est aussi l’occasion de revoir Blanche, dont on signalait qu’on était impatient de la retrouver le mois dernier, revenue aussi au premier plan à l’occasion de la découverte d’une grossesse surprise.
L’intrigue du mois de mai se poursuit en pointillé, surtout par le biais du portrait de Vincent, qui laisse lui monter à la tête son nouveau statut et l’argent facile (pas inintéressant mais un poil trop appuyé). Pour le reste, « PBLV » s’est montrée plus faible à faire vivre les autres éléments. Céline croupit un peu oubliée dans sa cellule, de même que son père, et Juliette tout comme le reste du quartier, semble peu affectée par tout cela.
On savait qu’Olivier Szulzynger avait l’intention de lancer une intrigue au long court, qui s’étalerait sur une année. C’est de toute évidence ce qui se joue en ce moment. En tout état de cause, ces surprises ont su relancer un intérêt chancelant pour la série, qui souffrait vraiment de routine depuis quelques mois, ainsi que de deux mois très faibles au printemps. Et tant pis pour les téléspectateurs de moins de treize ans qui trouvent que la série est devenue très compliquée...
Pour ce qui concerne les story B, je ne reviendrais pas trop sur l’intrigue sur le téléchargement que j’évoquais le mois dernier, cela s’est malheureusement conclut sur du politiquement correct des plus démagogique (entre deux affaires de meurtres, les flics de PBLV convoquent au poste les méchants pirates de 15 ans...). Pour se racheter, le même Nathan est actuellement au centre d’une intrigue qui nous rappelle les heures de gloire du personnage, dans laquelle lui et Nirina, sa petite amie très catholique qui entendait rester vierge jusqu’au mariage, décident finalement de sauter le pas. On continue de penser que la série souffre depuis quelques temps d’un déficit d’humain, que cette intrigue à elle seule ne suffit pas à compenser.
Aussi diffusés ces dernières semaines, mais abordés plus en détail sur ce site, nous vous invitons à vous pencher sur la première saison de « Greco », les premiers épisodes de « Mystère » et notre gros dossier consacré à la nouvelle série référence, « Reporters ».
On se donne rendez-vous à la rentrée... Bon été.
Dernière mise à jour
le 9 juillet 2007 à 05h34
[1] M6 - Marathon productions.
Première diffusion en mai - juin 2007
Scénario : Céline et Martin Guyot. Réalisation : Laurent Dussaux
Avec Ingrid Chauvin, Karina Lombard, Elodie Frenck
[2] France 3 - Télécip productions
Diffusion le samedi 2 juin 2007
Écrit par Catherine Bidaut. Réalisé par Manuel Poirier
Avec : Cécile Rebboah, Baptiste Caillaud, Marion Durand, Céline Cremon.