Par Emilie Flament.
Depuis plusieurs semaines, c’est l’angoisse tous les soirs lorsque le moment fatidique arrive : la consultation du programme TV ! Y aura-t-il enfin quelque chose de valable à se mettre sous la dent ce soir ?
Entre les télé-réalités, les concours de cuisine ou de talents en tout genre, et les téléfilms irregardables, il faut bien avouer que cette période n’est pas très riche en programme de qualité, voire même désertique. Alors que faire ? J’ai bien tenté de me rabattre sur la TNT, mais j’y ai trouvé le même vide intersidéral. Les sites de Catch-Up pourraient peut-être me sauver au cas où je ne regarderais pas la TV au bon moment ? Et bien non.
Pourtant, ces dernières semaines, France Télévision a sorti 2 séries de son cru, « Des vivants et des morts » et « La Maison des Rocheville », Canal + a ouvert sa « Maison Close », et M6 a repris ses « Scènes de Ménages »...
Alors pourquoi je m’ennuie autant devant mon poste ???
Devant cet état des lieux désespérant, j’ai du me rabattre sur ma collection de DVD pour occuper mes soirées, en rêvant que sous peu les séries françaises tant attendues fassent leur entrée... Comme Programme TV déprimant = Quinzo déprimé, j’espère qu’elles arriveront très vite !
Par Dominique Montay.
Alors… « Un dîner presque parfait »… sitcom. « D&Co »… huis clos psychologique. « C’est du propre »… drame ? « Recherche appartement ou maison »… euh… policier ? « Belle toute nue »… là je cale.
Bonjour à tous. Pardon ? Que suis-je en train de faire ? Et bien je m’entraîne. J’essaie de m’adapter aux changements fondamentaux que risque de subir le paysage audiovisuel français. Enfin, si quelqu’un écoute Nicolas de Tavernost et ses conseillers. Comme vous le savez peut-être, le gentil Nicolas (tous les Nicolas sont gentils, c’est un fait avéré : Nicolas le Jardinier, Nicolas Hulot, Nicolas de Nicolas et Pimprenelle, Nicolas II de Russie qui était surnommé Nicolas le Pacifique… tous super sympas ! bon, y’en a peut-être un qui fait tâche au milieu, mais vu qu’il n’est pas bien grand, et je ne parle pas de taille, on va l’exclure de l’étude) a décidé que les programmes de fictions, c’est pas bien.
Enfin, c’est surtout cher à produire. C’est sûr qu’une série policière avec des jeunes, ça coûte un peu plus que lâcher 2 caméras avec deux grands-mères dans un appartement crade avec 10 kilos de produits d’entretiens. Mais voilà, le gentil Nicolas est obligé par le CSA de remplir un quota. Il lui faut des fictions. Qu’à cela ne tienne, le gentil Nicolas a eu l’idée du siècle. Et si ces émissions fabuleuses qui améliorent notre vie quotidienne étaient considérées comme des fictions ? Ben tiens, pourquoi pas ?
Après tout, c’est écrit, non ? C’est un peu joué, non ? Demandez à Valérie Damidot si elle est tantôt aussi insupportable ou tantôt aussi mièvre que dans son émission ? Bien sûr que non, c’est du jeu d’actrice ! Sachant que tout est préparé, calibré, pré-écrit, dans ce cas, c’est de la fiction, non ? Les gens de chez M6 sont incroyables. Ils se targuent d’avoir des émissions qui font intervenir de vrais gens avec de vraies situations, mais au final, ils veulent assimiler leurs émissions à des fictions. Et donc en gros contredire la nature même de leurs programmes pour une histoire de gros sous.
Loin de moi l’envie de remettre en cause la légitimité de ces émissions. Mais point trop n’en faut. La BBC, elle aussi a son lot de produits grand public, pas choquants pour deux ronds, très calibrés aussi… mais ça ne l’empêche pas de produire de très bonnes choses. Il n’y a rien de choquant à se dire qu’une chaîne finance des projets intéressants ambitieux en vendant du grand public pas cher. Sur M6, ça arrivait de temps en temps. « Kaamelott », « Les Bleus », « Police District »… Une façon, certainement, de ménager la chèvre et le chou, de faire des choses par obligation et nécessité, et d’autres par envie ou par passion. Mais la manœuvre de de Tavernost prouve qu’il n’aime pas forcément faire de la télé.
On ne remet pas en cause non plus le fait qu’M6 n’est pas une société à but non-lucratif, mais aller jusqu’à vouloir imposer leur propre définition de la fiction au PAF, c’est quand même énorme. Bientôt, peut-être qu’ils obtiendront que la publicité soit considérée elle aussi comme de la fiction. Et là, jackpot ! Osé. Très osé… Je ne me souviens plus trop de telle catégorie de personnes Michel Audiard parlait quand il disait qu’elles osaient tout, et c’était même à ça qu’on les reconnaissait… je ne me souviens plus trop, et vous ?
Par Sullivan Le Postec.
L’enfer, comme chacun sait, est pavé de bonnes intentions. Dans la représentation de l’homosexualité dans la fiction télévisée, la bonne intention c’est la tentation de la tragédie. Dans ses tous derniers épisodes, diffusés vendredi 29 octobre et ce lundi 1er novembre, « Plus belle la vie » vient de s’ajouter à la longue liste de ceux qui ont cédé à ce travers.
Il n’y a pas énormément de personnages gay à la télévision. Et quand il y en a, ils ont une propension assez ahurissante... à mourir ! D’ailleurs, l’un des derniers spectaculaires exemples en date vient lui aussi du monde des soaps operas, et des derniers épisodes de « As the World Turns », annulé en septembre dernier après plus de cinquante années de diffusion. Ces cinq dernières années, le soap avait introduit un couple gay, Luke et Noah, dont la relation avait été largement compliquée par la censure (il a fallu des mois avant que la série ne montre un baiser, et encore plus avant qu’elle ne suggère des relations sexuelles dans le couple). Récemment, le couple s’était séparé, et Luke avait rencontré un autre homme Reid. Malgré des mois de liaison, ces deux-là n’ont jamais eu l’occasion (sic) de consommer leur relation. Finalement, les scénaristes ont décidé de conclure les choses en donnant à Reid une mort héroïque dans les derniers épisodes de la série. En deuil, Luke est dévasté ; tandis que Noah, terriblement seul parce que toujours amoureux de Luke, décide de quitter la ville. Bref, tous les personnages gay finissent ou morts, ou totalement malheureux.
Le parallèle est facile avec « Plus belle la vie ». Dans l’épisode de vendredi, Thomas a vu son ex, dont il a partagé la vie près de trois ans, se faire poignarder par derrière avec un tournevis par un autre personnage gay (symbolique de bon goût s’il en est)...
Il faut savoir que, si les morts violentes sont légions dans le soap de France 3, elles ne touchent qu’extrêmement rarement les acteurs principaux, même quand ils quittent la série. En fait, le seul autre exemple dont j’arrive à me souvenir n’est autre que... le précédent petit-ami de Thomas, Nicolas.
Certes, un an et demi après la mort de Nicolas, on avait appris que ce décès n’était qu’une mise en scène et que Nicolas était bien vivant, effectuant une enquête infiltré dans une organisation de malfrats. Rebondissements abracadabrantesques mis à part, Thomas se retrouve face à son deuxième deuil amoureux en quatre ans, ce qui témoigne clairement d’une tendance à aller vers la tragédie.
Pas question de prétendre de voir de l’homophobie dans le sort du Juge Florian Estève, ni dans le final de « As the World Turns ». Les scénaristes de « PBLV » ont largement prouvé le contraire depuis le début du feuilleton, et vu les emmerdes de cette storyline a apporté aux auteurs du soap américain de la chaîne conservatrice CBS, c’est bien leur détermination et leur engagement qui a permis à Luke et Noah d’être des personnages principaux pendant cinq ans (la fin de « As the World Turns » ne laisse plus aucun personnage régulier gay ou lesbienne dans le monde des soaps quotidiens américain).
C’est probablement plutôt le contraire : la sympathie et l’empathie des auteurs pour les problématiques liées à l’homosexualité les conduisent inexorablement à céder çà la tentation de la tragédie. Nicolas, par exemple, avait été « tué » par son père, rongé par une haine homophobe qu’il devait à ses propres pulsions. La bonne intention est claire. L’enfer, c’est que les sources d’identification positives en viennent à se réduire à pas grand-chose. Il y a déjà assez peu de représentations réalistes de l’homosexualité à la télévision, si celles qui existent en viennent toutes au drame, le message véhiculé risque fort d’en devenir contre-productif.
Dernière mise à jour
le 1er novembre 2010 à 23h15