Il y a quelques jours, M. Fillon affirmait en direct à la radio que, même en y regardant de près, il ne voyait aucune différence entre les chaines de télévision privées et celles du Service Public.
Loin de nous l’idée d’affirmer que l’Audiovisuel Public Français actuel est parfait. Nous sommes même plutôt d’avis que la direction de Carolis - Duhamel est largement responsable de la situation, à force de compromissions et de manque de vision, de souffle et d’indépendance politique et éditoriale. Néanmoins, cette sortie du Premier Ministre confirme que les Politiques devraient définitivement s’abstenir de parler de sujets auxquels ils ne conaissent rien. Et de légiférer, accessoirement. L’idéal serait que le pouvoir politique donne les moyens à l’Audiovisuel Public de l’indépendance et de l’ambition éditoriale qu’il prétend appeller de ses voeux, puis qu’il le laisse définitivement tranquille.
Un beau matin de début janvier, le président Sarkozy annonçait donc la suppression totale de la publicité sur le Service Public. Plus d’un mois après, on ne pourra pas nous faire le procès de ne pas lui avoir laissé le bénéfice du doute, et le loisir de nous prouver que la mesure n’avait pas été improvisée pour animer une conférence de presse par ailleurs dépourvue d’annonces importantes sur les sujets de préoccupation du moment. Cette décision a été prise avant même que ne soit entamée la réflexion sur les moyens alternatifs de financer France Télévisions. On parle tout de même de 1,2 milliards d’euro. Par an. Et encore, juste pour assurer une stabilité du budget (et donc une réduction des capacités de production, compte-tenu de l’inflation). Comme les pistes alternatives à la publicité à l’étude sont passablement précaires et/ou ridicules, il est devenu clair que l’Audiovisuel Public, plongé le 8 janvier dans une période de profondes turbulences, allait y rester longtemps. Sans compter qu’il sera évidemment encore plus malsain de faire reposer le financement de France Télévisions sur les recettes publicitaires de ses concurrents — et donc sur leur succès — que sur des pages publicitaires diffusées sur ses antennes entre deux programmes.
L’annonce a aussi avantageusement dissimulé le fait que, victime d’un sous-financement chronique, le Service Public de télévision avait besoin d’une rallonge budgétaire. Il y a six mois, de Carolis militait pour l’obtenir ; maintenant, il sera content si le budget reste stable ces quatre prochaines années.
Depuis un mois, les lobbies de l’audiovisuel privé s’en donnent à coeur joie pour profiter de cette trop belle occasion de pilonner France Télé. Sans honte, Mougeotte affirmait dans un Grand Jury (où il assume le porte-parolat décomplexé de tous les lobbies financiers, sous couvert de journalisme) que la BBC se limite à deux chaines. Oubliant (?) que les BBC se comptent jusqu’à quatre, sans parler de BBC Parliament, CBBC (chaine jeunesse), des divisions internationales BBC World, BBC Prime ou BBC America.
Certains militent pour que la holding publique se sépare de France 2, d’autres de France 4. Par le plus grand des hasards, les premiers sont souvent proches de TF1, les seconds de M6. Ne serait-ce pas pratique de pouvoir flinguer ni vu ni connu son principal concurrent ?
Même avec un budget stable, et donc des capacités de production en baisse, et sachant la précarité des financements envisagés à l’heure actuelle, il est acquis que France Télévision sera encore plus qu’aujourd’hui privée des moyens de résister. L’instabilité et l’affaiblissement actuels dureront au moins jusqu’à la prochaine législature. Là, on aura pu que tirer le bilan de l’échec de la réforme. Selon ceux qui seront alors aux manettes, on aura soit le courage d’augmenter la redevance au niveau de celle des anglais ou des allemands, ou la lâcheté de démembrer France Télévisions et de porter l’estocade finale qui entérinera la berlusconisation du Paysage Audiovisuel Français...
Cette semaine, les scénaristes américains ont mis fin au mouvement de grève entammé il y a trois mois. Mais, le temps d’écrire quelques scripts, de reprendre les tournages et de finaliser les épisodes, il faudra encore plusieurs semaines avant que les grilles des chaines américaines ne reviennent à la normale.
En attendant, certains pourraient se retrouver bien démunis sans séries à regarder. A ceux-là, nous avons pensé que c’était peut-être le moment ou jamais de conseiller quelques grandes fictions européennes et francophones. Les rédactions de pErDUSA et de Spin-Off se joignent à celle du Village pour proposer leur propres coups de coeur.
Après ce dossier d’actualité, nous reviendrons le mois prochain sur Russel T Davies avec la deuxième partie du dossier qui lui est consacré. Be seing you !
Dernière mise à jour
le 16 février 2008 à 02h09