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A Gifted Man - L’histoire classique du "méchant médecin qui voit le fantôme de son ex et devient gentil"

A Gifted Man: A Wasted Woman

Par Jéjé, le 11 octobre 2011
Par Jéjé
Publié le
11 octobre 2011
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Ouais, CBS, c’est la chaîne des vieux, c’est la chaîne de NCIS, c’est la chaîne de Big Brother, c’est la chaîne de Rules of Engagement… Hmm, remarquez, c’est pas mal, en fait ! Qu’est-ce que je voulais bien dire en commençant mon intro de façon ?

Oui, que CBS, c’est le network tendance, celui qui a régénéré le genre judiciaire avec The Good Wife et The Defenders [1].

Alors, moi, sensible aux effets de mode, même si j’entends que A Gifted Man, c’est Ghost Whisperer avec un seul fantôme, et bien, ça me donne quand même envie…

Qu’est-ce que c’est ?

A Gifted Man est la nouvelle série victime de la malédiction de la case du vendredi de 20h00, qui ne remet pas de l’annulation de… Numb3rs. L’année dernière, l’esprit vengeur des mathématiques a eu raison de MediuM, de Chaos et de The Defenders.

C’est en outre l’une des rares séries à avoir été créée cette saison par une femme qui n’est pas Shonda Rhimes, Susanna Grant, à qui l’on doit les scénarios de Pocahontas et de Erin Brokovitch.

C’est avec qui ?

Deux acteurs géniaux.

Patrick Wilson, le jeune D.A. mormon empêtré dans l’acceptation de sa sexualité, dans Angels in America, à cette époque bénie où les mini-séries de HBO ne se faisaient pas écrabouillées aux Emmys par des séries anglaises en costumes ringardes [2].

Et Margo Martindale. La Mags Benett de Justified !

De quoi ça parle ?

Après trois épisodes, je ne suis pas encore bien sûr.

C’est un peu un Breaking Bad à l’envers. Vous savez, la série qui suit la transformation d’un gentil prof de chimie en le plus dangereux trafiquant de drogues du monde.
Parce qu’il a un cancer.

Là, c’est l’histoire du plus grand neuro-chirurgien du monde, qui ne pensait qu’à l’argent, au frisson du scalpel et à ses riches amis de Park Avenue, avant qu’il ne se mette sur le chemin de l’altruisme et du don de soi.

Parce qu’il a rencontré le fantôme de son ex-femme...

Et c’est bien ?

Je ne sais pas.

Je ne crois pas.

Ca fait quand même trois épisodes que Margo Martindale passe son peu de temps d’antenne à déambuler dans une sorte d’Apple Store (apparemment, c’est un hôpital), son iPad à la main, à rappeler ses rendez-vous médicaux à son patron. Sans que l’on puisse voir comment ce personnage va pouvoir s’intégrer davantage à l’intrigue générale. C’est tout de même un énorme souci de voir la révélation de la saison dernière engluée dans un second rôle générique, qui nous ferait presque regretter que Ryan Murphy ne l’ait pas engagée comme la moitié des bons acteurs de séries pour aller faire n’importe quoi dans American Horror Story.

Et toujours pas d’iPhone 5 alors ?

Ce serait un détail si la série donnait l’impression de savoir où elle va. Je n’aime rien d’autre que d’être perplexe et un peu perdu au début d’un film ou d’une série si j’ai la sensation d’être embarqué dans un univers maîtrisé. Or, depuis trois épisodes, A Gifted Man répète la même trame encore et encore : Michael Holt est très embêté d’avoir affaire au fantôme de son ex-femme qui le pousse à s’aventurer sur le terrain de la médecine des pauvres.

Il y aurait pourtant matière à approfondir des thèmes rares à la télévision. La médecine à deux vitesses aux Etats-Unis, par exemple, n’est jamais illustrée que par l’opposition d’histoires de gentils pauvres reconnaissant à un grand médecin de s’intéresser à eux et des gentils riches qui ont de graves problèmes neurologiques et n’a d’autre fonction dans la série que d’offrir au héros deux terrains d’action différents.

Sans traitement critique du contexte, l’irruption du surnaturel ne permet pas à la série de tendre vers la fable morale à la Dickens. Surtout que la présence du fantôme insiste davantage sur le lien amoureux qui existait entre les deux personnages et diminue ainsi le rôle de conscience à la Jiminy Cricket spectral qu’il pourrait jouer. Autre problème, l’actrice « incarnant » le fantôme fait penser à une sous Laura Linney, figée dans une unique expression insupportable de compassion amusée…

Ne reste donc à se mettre sous la dent que l’évolution de Michael Holt, évolution qui ne va pouvoir se produire qu’en peu de temps : combien de temps va-t-il pouvoir passer à ronchonner qu’il ne veut pas s’occuper des patients de la clinique des pauvres tout en le faisant ?
Et une fois qu’il aura embrassé son destin de philanthrope, la série n’aura définitivement plus raison d’exister.

Les audiences risquent de résoudre plus vite ces problèmes que les scénaristes.

C’est terrible, mais l’annulation de A Gifted Man est sûrement ce qui peut arriver de mieux à Patrick Wilson et Margo Martindale, qui méritent des projets un peu plus ambitieux.

Jéjé
Notes

[1Je maintiens que c’était l’une des meilleures séries mise à l’antenne la saison dernière.

[2Non, je ne digère pas la défaite de Mildred Pierce face à un soap paresseux qui ne fonctionne que grâce à l’accent de ses interprètes.