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Chicago P.D. - Critique du pilote en catimini de la troisième série dérivée de Chicago Fire

Chicago P.D. (Pilote en Catimini) : So Little Law & So Much Order

Par Jéjé, le 9 juillet 2016
Par Jéjé
Publié le
9 juillet 2016
Saison 3
Episode 21
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Adepte de séries judiciaires, je suis extrêmement frustré par l’offre actuelle de la télé US concernant cette catégorie. La « Peak TV » ne concerne pas tout le monde, apparemment…

C’est alors avec une certaine dose d’excitation que j’ai appris ce printemps que NBC avait commandé pour la saison prochaine une saison de Chicago Justice (anciennement Chicago Law), la version « avocats et procureurs » des séries Chicago de Dick Wolf, avec Philip Strike Back Winchester et Joelle Justified Carter.

Je ne me suis cependant décidé qu’hier à regarder regarder l’épisode diffusé en mai de Chicago PD qui a servi de back-door pilot pour la série.

Le tombereau de blagues ultra faciles qui a suivi l’annonce de ce nouveau spin-off (« Euh, c’est quand Chicago Jardiniers ?  ») n’est pas en cause. C’est la faute de Dick Wolf lui-même.
Cela fait quelques mois que j’ai repris avec grand plaisir Law & Order : SVU. Cette re-découverte m’a conduit, malgré moi, à regarder trois épisodes de Chicago PD, les trois vendus comme des parties de cross-overs avec SVU, et malheureusement trois épisodes qui en donnent l’image désastreuse (voire répugnante) d’une série qui glorifie l’usage de la violence par la police, le corporatisme le plus étroit et le patriarcat.

J’ai commencé à me dire que Chicago Justice partait avec quelques handicaps au vu de l’univers auquel elle se rattache et, au delà de ces considérations, je me suis souvenu que ce n’était pas le tout pour qu’une série judiciaire fonctionne (même pour moi) qu’elle mette à l’antenne de scènes de prétoires chaque semaine, qu’il y avait quelques choix narratifs importants pour elle à faire.

Mon pessimisme a cru avec les jours, mais hier, je me suis décidé à faire face.

J’ai un truc avec les séries judiciaires, j’aime bien que ce soit des séries judiciaires, et pas des séries policières déguisées où les juristes refont, à la Perry Mason, l’enquête de la police qui a abouti à l’arrestation d’un accusé.

Première légère déception, c’est exactement ce à quoi passe son temps le bureau du procureur ici. Mais cette démarche, a priori rédhibitoire pour moi, se justifie par le fait qu’une policière est directement impliquée dans l’affaire, backdoor pilot oblige. En effet, la benjamine de Chicago PD et son partenaire de patrouille se font tirer dessus dans leur voiture. Cette dernière part poursuit leur agresseur à pied et lui tire dessus à son tour. Il survit mais aucune arme n’est retrouvée sur lui.
Il est dans ce cadre même plutôt rassurant que les petits nouveaux ne fassent pas confiance à l’enquête initiale de la police, d’autant plus que le supposé tireur est noir et que l’affaire s’inscrit dans le contexte actuel des nombreuses bavures racistes aux États-Unis et du mouvement Black Lives Matter.

Et j’ai un truc avec les séries judiciaires, j’aime beaucoup que leurs épisodes soient l’occasion d’explorer les différentes facettes de sujets de société.
J’avais commencé à me réjouir mais mon enthousiasme fut de courte durée. L’étudiant abattu par la policière se révèle au fil de l’épisode moins modèle que présenté au début de l’affaire. Et surtout, les militants de la cause noire dénonçant une bavure raciste apparaissent comme une force d’entrave à la justice plus prompte à agir selon une idéologie qu’à laisser les institutions faire correctement leur travail.

Pire, leur présence devant le tribunal est une façon pour la série de montrer le courage de la policière capable de braver une foule haineuse pour témoigner et faire avancer la vérité.

Leurs positions ne sont jamais légitimées, le personnage du DA, noir, n’y fait référence que comme un problème pour sa campagne de ré-élection.
Chicago Justice semble bien s’aligner dans l’esprit nauséabond de Chicago PD.
La fin de l’épisode est édifiante : tandis que les délibérations du jury s’éternisent, le bureau du procureur propose un plea deal à l’accusé, à la condition que sa victime, le partenaire de la policière, n’accepte qu’il n’ait qu’une peine réduite de prison à effectuer. Afin d’éviter que Chicago, sa ville, his city, soit en proie à des émeutes si jamais le jury ne sortait pas avec la bonne décision, il se sacrifie et permet que l’accord se fasse.

Cette conclusion aurait pu avoir un goût moins amer si les scènes de tribunal avaient contrebalancé cette vision résolument pro-institutions de l’épisode, mais là encore, la déception est grande.

L’avocate de l’accusée est à la limite de l’incompétence, elle pointe de temps en temps la dimension « vaguement » raciste de l’affaire mais sans développer ni le contexte sociétal ni des éléments précis du dossier. Elle est surtout occuper à tenter de manipuler grossièrement les preuves présentées par la police.
Il n’y aucun enjeu dans la bataille judiciaire tant le déséquilibre est grand entre les deux parties (l’ADA maîtrise, l’avocate fait n’importe quoi) et le refus de faire références aux lois est patent.

Mais tout ça ne serait finalement pas si grave si cet épisode ne tentait pas une filiation avec Law & Order.
Parce que j’ai un truc avec les séries judiciaires, j’aime beaucoup qu’elles soient Law & Order.

Car l’avocate, ce n’est pas n’importe qui, c’est Shambala Green (Lorraine Toussaint), l’une des adversaires les plus redoutables de Ben Stone, spécialisée dans les droits civils et le personnage féminin le plus marquant des trois années où Law & Order avait une distribution principale entièrement masculine [1].

Chicago Justice avait eu la bonne idée de nous la présenter en début d’épisode comme s’étant embourgeoisé. Lors de sa première apparition, l’ADA se moque gentiment de ses signes extérieurs de richesse, elle s’en défend. Je trouvais à ce moment-là que c’était un clin d’œil amusant pour tous ceux qui avaient connu son personnage (et qui avait pu suivre avec les années un chemin un peu similaire), mais en faire une incapable dans le prétoire, c’est la pire faute de goût de cet épisode.

Chicago Justice ne semble donc vraiment pas être sur les traces de Law & Order (un poil compliqué je veux bien le concéder), ni même de Raising The Bar, par exemple, série très sympatique de TNT avec Mark-Paul Gosselar.

Je place désormais mes derniers espoirs dans Conviction, la série judiciaire de ABC, où Agent Carter joue la fille du président des États-Unis (sic) qui tente de réparer des erreurs judiciaires (Perry, es-tu là ?).

De faibles, très faibles espoirs.

Jéjé
Notes

[1Elle apparaît pour la première fois en 1990 dans le deuxième épisode de la série, celui où Cynthia Nixon tire sur deux hommes noirs dans le métro, épisode dont Nico me chantait les louanges il y a quelques semaines à peine. J’en garde un très bon souvenir, mais un tout petit peu flou, ne l’ayant pas revu depuis une bonne grosse dizaine d’années.