Pas parce qu’elle n’était pas logique, mais parce que même dans mes rêves les plus fous, malgré toute la force avec laquelle je le souhaitais (pour lui au moins autant que pour moi) je n’ai jamais osé espérer qu’il puisse changer.
Cette année, Abed a connu des moments difficiles, et d’autres très beaux. Je crois que les gens normaux, dans la vraie vie, résumeraient ça par trois mots : il a grandi.
Il a traversé ce par quoi beaucoup d’entre nous passeront, ou sont passés. La fin d’un mode de vie qui lui était familier, et un retour à celui-ci. Une première vraie petite amie, qui a su le comprendre et le compléter. Et, parce que c’est le lot commun de tous - de prendre des chemins différents de ceux qu’on aime et de parfois les perdre au passage - l’éloignement de son ami le plus cher, qui l’a forcé encore une fois à se réfugier dans un monde imaginaire.
"It’s not a game for me, Troy, I’m seeing real lava because you’re leaving, it’s embarrassing. I don’t want to be crazy but I am crazy, so I made a game that made you and everyone else see what I see."
Sauf qu’Abed n’était pas fou. Il était, comme beaucoup d’entre nous l’ont été, quelqu’un qui avait peur du changement, au point qu’il préférait s’évader plutôt que de s’y confronter. Certains fuient cette réalité en allant d’une ville à l’autre, sans jamais se fixer, parce que se fixer voudrait dire appartenir à quelque chose, quelque chose qui allait forcément changer. Certains la fuient avec l’alcool et la drogue. Et certains, certains la fuient en s’imaginant autre chose. Quelque chose qui leur permettrait de toujours garder auprès d’eux ceux et ce qui ne le resteront pas.
"I don’t think the lava’s here because you’re leaving, I think it’s here because I won’t let go.”
Mais tôt ou tard, on doit arrêter de fuir, et on doit laisser les gens et les choses s’en aller et changer.
Abed devait comprendre ça et l’accepter. Arrêter de s’échapper, comme il l’avait fait suite à la lettre de sa mère en saison 2. Devenir un adulte, et savoir tourner les pages de son propre script.
Et c’est ce qu’il a fait, en seconde partie de saison.
Toutefois, et tout aussi important, dans les deux derniers épisodes, il nous a montré que grandir n’impliquait pas de perdre ses fantaisies et ses rêves. Qu’on n’était jamais trop vieux pour une chasse au trésor, et pour laisser nos folies nous sauver. Que quoi qu’il arrive, on ne doit jamais perdre cette part de nous.
Dans un passage très connu du Petit Prince, celui-ci découvre une planète habitée par un businessman, qui ne lève même pas la tête à son arrivée. Quand il est « dérangé » par celui-ci. Qui ne voit pas des étoiles, mais « des petites choses dans le ciel », qu’il préfère compter et posséder qu’admirer. Parce qu’il est un homme sérieux. Une grande personne. Une idée qui m’a terrifiée, enfant.
J’ai longtemps cru qu’Abed n’allait jamais grandir. J’ai longtemps cru que, Dan Harmon semblant malheureux, c’était ce qui attendait le personnage. Ce qui m’attendait.
Mais malgré tous ses défauts, la saison 5 aura au moins eu ce mérite. Me rappeler qu’on peut tous évoluer, et que si par moment on se sent perdus, ce n’est jamais vraiment le cas.
Beaucoup ont trouvé cette saison 5 étrange, inégale, dissonante, mais ce que je garderai d’elle, c’est qu’elle nous a montré plus que jamais qu’Abed était, est et restera Dan Harmon.
Si tout se termine sur cette saison 5, la seule chose que j’aimerais dire à Community, c’est merci. Merci de m’avoir accompagnée, de m’avoir donné un personnage ainsi qu’une personne à admirer et à aimer, deux individus qui m’ont guidée, dans lesquels je me suis retrouvée plus que je n’ai jamais cru le mériter, et une série qui m’a bien souvent tenu la main et fait pleurer. Merci de m’avoir confrontée à mes craintes, à mes démons, à tout ce que je pouvais détester chez moi. Merci, Dan Harmon, d’avoir été aussi fucked up que j’ai pu l’être. Merci d’être aujourd’hui heureux. Merci de n’avoir jamais caché ce que tu ressentais, merci de l’avoir exposé dans une série TV et sur Internet, à tous tes followers, à tous ceux qui voulaient te lire.
Que tu sois une célébrité importait peu. Merci d’être et de rester a human being.