21 janvier 2006
Episode The
Pourquoi une telle question ?
Non, EDUSA ne va pas complètement modifier sa ligne éditoriale et se lancer dans les reviews de CSI : Miami et de Close to Home, faire des mises à jour régulières du portrait de Fred Dalton Thompson et reprendre dans son fil info la ligne éditoriale de FOX News.
Cette question du mois marque plutôt le regain d’intérêt d’EDUSA pour « The West Wing » qui a su se retrouver et se renouveler à la suite d’un gros passage à vide en cinquième saison et vous propose d’analyser les évolutions qui ont eu lieu depuis un peu plus d’un an et les raisons de cette résurrection.
Qui l’aurait cru ?
Qui aurait cru que Conundrum suive avec envie et assiduité une saison de The West Wing malgré le départ de Aaron Sorkin, son créateur ? Pas lui en tout cas... Et pourtant.
Quand au premier trimestre 2003 est tombée la nouvelle que Sorkin quittait la série à la fin de la saison en cours (la quatrième à l’époque), on ne peut pas dire qu’elle ait déclenché beaucoup d’enthousiasme.
La cinquième saison qui débuta en septembre de la même année fit vite comprendre que ce départ créateur avait porté un terrible coup à la série.
L’équipe mise en place par John Wells, le nouveau Showrunner, n’arrivait pas à trouver le bon rythme. Vouloir faire du Sorkin quand on n’est pas Sorkin, n’est pas une bonne idée. Malgré quelques bons épisodes, des dialogues qui sonnaient plat donnaient la désagréable sensation de ne voir que le fantôme des personnages et renforçaient l’idée que la série était finie, morte et enterrée.
Mais l’équipe semble avoir bien compris ses erreurs. Les critiques qui ont fusées semblent avoir été entendues. Pour récupérer le public qu’elle s’est aliénée, la Wells Team a essayé de donner une nouvelle voix à la série et un nouveau visuel...
Le début de la sixième saison a changé la donne.
Pourtant, le départ peu réaliste, et limite overzetop, n’a rassuré pas les rares aficionados de la série qui ont continué à la suivre.
En effet, durant les neuf premiers épisodes, la Wells team s’amuse à éparpiller l’équipe présidentielle, à la grande incompréhension des amateurs de la série : crise cardiaque de Leo MacGarry, dispute entre Josh Lyman et Toby Ziegler, départ de Josh pour devenir le conseiller de Matt Santos, un des candidats démocrates pour la course à la Présidence. CJ Cregg devient Chief of Staff à la place de Leo, qui au passage a rejoint Santos comme candidat à la vice-présidence. Toby remplace C.J. comme conseiller en communication. Will Bailey, depuis l’an dernier dans l’équipe du vice-président en place, se lance en campagne avec lui, trouve de l’aide en Donna Moss qui n’a pas suivi Josh. Bref c’est la bérézina dans l’aile ouest.
Autant dire que, pour beaucoup, la série n’a toujours rien à dire et la Wells team continue de casser son beau jouet. Pourtant, au fil des épisodes, un schéma se fait jour : ces remaniements, ou plutôt bouleversements, n’apparaissent n’être en rien gratuits et participent à l’élaboration de la nouvelle orientation de la série.
Le reste de la saison alors montre la course des Primaires entre les différents candidats démocrates en parallèle de la campagne du candidat républicain Arnold Vinick, redonnant un sang neuf à la série. En laissant de côté l’administration Bartlett et ses intrigues peu engageantes pour se concentrer sur les Primaires, on change presque de série. Certains épisodes n’ont même pas deux minutes à la Maison Blanche. Une mutation télévisuelle en direct.
Mieux. En donnant presque autant d’importance au personnage d’Arnold Vinick, qui apporte le contre point républicain, la série offre l’alternance politique et déploie sous nos yeux une véritable leçon de démocratie et de politique. Leçon toujours vue sous l’angle idéaliste de la série, mais après tout, ce n’est pas comme ça que devait être la politique ?
La course des Primaires se finit à la fin de la saison 6. La saison actuelle, la septième pour ceux qui suivent, se concentre principalement sur la dernière ligne droite vers la Présidentielle et donne un coup de fouet aux scénaristes. Les intrigues à la Maison Blanche reprennent du poil de la bête, et chaque membre du staff, bien que n’apparaissant pas dans tous les épisodes, a une intrigue lui permettant d’avoir son quart d’heure de gloire. Un véritable renouveau pour la série : tout le monde étant utilisé à bon escient.
Pour être complètement honnête, il nous faut nuancer notre enthousiasme, ou plutôt, prévenir qu’une fois de plus EDUSA se retrouve seul face au monde. En effet les dernières saisons de TWW ne déchaînent pas le même enthousiasme chez nous qu’à travers le globe. Trop de changements doit nuire à l’esprit coca-cola des téléspectateurs sans doute.
Toutefois, laissez la chance à la série, surtout qu’elle se permet de garder un certain suspense sur l’issue de la campagne. Qui va gagner cette Présidentielle, l’idéaliste et parfait représentant démocrate au Congrès Matt Santos, ou le charismatique et intelligent sénateur républicain Arnold Vinick ?
Matt Santos : le renouveau démocrate
Il apparaît de plus en plus probable que, si The West Wing est renouvelé, Matt Santos remplacera Jed Bartlett. Des sa première apparition dans la série, Matt Santos a été présenté comme un outsider. Josh Lyman l’a remarqué et a réussi à le convaincre, non sans quelques difficultés, à se présenter à l’élection présidentielle. Et rapidement, le candidat malgré lui a pris une place croissante dans la série. Cette qualité d’outsider est probablement l’aspect le plus intéressant du personnage. Outsider au sein de son propre parti. Le parti démocrate avait quatre candidats potentiels pour affronter Arnold Vinick et Matt Santos était loin d’être le favori lors des Primaires. Toute la seconde partie de la saison l’établira en tant que candidat idéal du parti démocrate. Outsider de son état, Santos est le candidat latino mais refuse d’être cantonné à cette simple description. Il refuse de faire des thèmes raciaux les moteurs de sa campagne, préférant se focaliser sur sa reforme de l’éducation.

On pourrait croire que se battre malgré son statut d’outsider vient d’une forte volonté à devenir Président. Et pourtant. Vinick, lui, affiche son ambition, il ne s’en cache pas. On sent qu’il veut être Président, et être un bon Président. Santos, semble suivre plutôt que mener. C’est Josh Lyman qui le convainc, et c’est Josh qui semble prendre ou fortement suggérer toutes ses décisions. Du coté des Républicains, il est clair que Vinick choisit les batailles tout en prenant en compte l’avis de ses conseillers, dont Bruno Giannelli, incarné par Ron Silver, qui avait aidé Bartlett lors de sa réélection. Santos suit, et Santos semble principalement se défendre. Quand il refuse de se battre sur les thèmes sociaux, comme l’immigration, c’est Vinick qui s’y attaque le premier, Santos ne fait que réagir. Cette politique de défense peut nous faire douter de sa volonté de vouloir devenir Président. Et c’est peut être cet aspect qui sauve un personnage un peu trop lisse.
La saison 6 nous l’a montré comme le candidat démocrate idéal. La saison 7 semble nous montrer l’ascension de Santos au pouvoir. Si Santos était un candidat parfait, les enjeux seraient peu importants. En commençant à le montrer en position de faiblesse, en introduisant un rival dangereux car charismatique, l’évolution de Santos peut s’avérer fascinante. Vu le flash forward du premier épisode de la saison qui laisse suggérer que d’ici trois ans Santos sera Président, il paraît presque évident qu’il sera le vainqueur de l’élection. Et maintenant le plus dur et le plus intéressant reste à faire, convaincre que Santos peut devenir Président. A l’issue du dernier épisode diffusé en 2005, Leo MacGarry, incarné par feu John Spencer, expliquait à au candidat démocrate que Josh l’avait emmené aussi loin qu’il avait pu, maintenant c’était à Santos de jouer. La deuxième partie de la saison sera décisive pour le personnage.
De plus, l’idée de Santos à la Maison Blanche semble être la meilleure solution pour l’avenir de la série. L’idée d’un jeune JFK latino incarné par Jimmy Smits sera un argument assez convaincant quand Wells and co essayeront de convaincre NBC de renouveler la série pour une huitième saison. Et s’ils y parviennent, on peut aisément imaginer Bradely Whitford et Janel Moloney au générique d’un The West Wing nouvelle version. Car si Vinick paraît plus intéressant que Santos, la saison 7 a introduit un staff particulièrement engageant, presque autant que celui de Bartlett. Il y a bien sur Josh Lyman qui a été rejoint par sa fidèle Donna, mais il y a surtout l’humoriste Jeanene Garofealo dans un rôle bien sérieux qui lui va comme un gant. Pour incarner la Première Dame, succéder à Stockard Channing est une tache difficile, mais la talentueuse Teri Polo de Sports Night et de I’m With Her forme un duo complice et charmant avec Jimmy Smits.
En tout cas, s’il est évident que Arnold Vinick à la tête de la première puissance mondiale nous ferait énormément plaisir, Matt Santos président peut être une agréable surprise. Et puis, ca peut pas être pire que Geena Davies, non ?
Arnold Vinnick : le charisme républicain
Surtout que Santos est un démocrate, et depuis plus de six ans, nos amis dans The West Wing, ce sont les démocrates.
Et nos amis sont des gens übercool : ils sauvent régulièrement la planète de la menace atomique rien qu’en marchant dans des couloirs avec des dossiers dans les bras, ils font diminuer le chômage et la pauvreté tout en jouant à celui qui parlera plus vite que Lorelei Gilmore...
Mais il existe tout un groupe de personnes qui veulent prendre le travail de nos amis.
Ce sont les Républicains.
Evidemment, on ne les aime pas.

Oh certes, c’est comme les téléspectateurs de CSI, les rédacteurs de Metropolis, les Acariens, y’en a des biens ! (Y’avait la petite Ainsley Haynes dans la saison 2 par exemple, mais quand cette pauvresse est partie faire joujou avec les éprouvettes et les rayons X à Miami, elle est devenue pire qu’une Républicaine... Une experte... Bourps !), mais quand même... Les ennemis de nos amis sont nos ennemis, c’est logique...
Alors en cette période où nos amis risquent d’être dégagés du bac à sable si leur chef ne gagne pas un concours de popularité, aurait-on la moindre raison de leur tourner le dos et de soutenir leurs ennemis ? Nos ennemis ?
Des ennemis que l’on connaît à peine ? Avec un nouveau chef, que l’on connaît encore moins ?
Peut-être l’attraction de la nouveauté.
Rien d’autre ?
A première vue non.
Arnold Vinick, le candidat républicain à la Présidence, est un WASP d’une soixantaine d’années, sénateur depuis 24 ans, pour la peine de mort, pour la réduction des taxes, grand supporter des entreprises et contre l’interventionnisme de l’état fédéral dans l’économie.
Banal.
Oui, mais...
1) Arnold Vinick est un ami de Jon Stewart
Pendant six ans, The West Wing s’est acharnée à montrer la vie politique à travers le prisme utopique de démocrates presque parfaits, consciencieux, altruistes, impliqués, fins stratèges, soucieux du bien publique et de la défense des minorités, sans être pour autant naïfs et angéliques.
Pourquoi la série ne pourrait-elle pas dépeindre les Républicains de façon aussi attractive ?
Cela permettrait au téléspectateur d’envisager sans réticence la possibilité d’une maison blanche républicaine pour les saisons suivantes et de ne pas ainsi rendre factice l’argument numéro un d’une campagne présidentielle, l’incertitude sur le nom du vainqueur.
Ainsi Arnold Vinick est Républicain. Assez conservateur sur les idées économiques donc.
Mais sur les sujets sociaux, il n’a rien à envier à ses opposants : il est pro environnementaliste, pro avortement, il envisage les problèmes sociaux de façon résoudre ceux des plus démunis...
Il se place forcément à l’aile gauche du parti, à la fois franc-tireur et rassembleur.
Et apparemment intelligent et honnête.
Ce n’est pas EDUSA qui le dit, c’est Leo MacGarry, dans le 6.08, à sa première apparition dans la série.
“Ever see Arnie Vinick campaign up close ? He’ll go into those high school gymnasiums in Iowa and New Hampshire and blow them all away.... and sound smarter and more honest than any Republican they’ve ever seen. Because he is.”
Avec un tel personnage, on est vraiment dans le monde gentillet et improbable de The West Wing.
Quoiqu’apparemment pas.
Ils existeraient réellement ces Républicains, qui peuvent attirer la sympathie des électeurs avec une sensibilité libérale Les conservateurs du parti leur ont donné un petit nom. Ce sont des RINO.
Republicain In Name Only.
Et John McCain, le RINO le plus célèbre et le plus influent, qui semble avoir inspiré le personnage de Vinick - à ceci près qu’il est anti-avortement -, est un ami de John Stewart.
En gros, il est déjà venu plus de 6 ou 7 fois au Daily Show !
Et ça nous suffit en tout cas ! Pour nous, Vincik est un pote de Jon Stewart et c’est suffisant pour qu’il ait notre vote !
2) Arnold Vinick est Alan Alda
Il est maintenant inenvisageable que Josiah Bartlett ait pu ne pas être incarné par Martin Sheen. Il est des acteurs dont le talent dépasse l’excellence du jeu et provoque une symbiose entre lui et le personnage.
Alan Alda est de cette trempe d’étoiles du divertissement.
Celui qui écrit ses lignes est un fan du monsieur depuis qu’il l’a découvert dans deux des meilleurs films de Woody Allen « Crimes et délits » et « Meurtre Mystérieux à Manhattan » (on connaît le talent de ce dernier pour aligner les découvertes, de Sylvester Stallone à Thiffani Amber Thiessen en passant par Tea Leoni). Ses pairs de la télévision n’ont pas attendu pour le consacrer (il a obtenu avec son rôle de TWW sa 31ème nomination aux Emmys Awards). Tenter de résumer le C.V d’Alan Alda semble une tâche aussi ardue que trouver une ligne de dialogue intelligente dans « Commander in Chief »... Acteur, scénariste, réalisateur, écrivain, le gars est un touche à tout assez génial, et on s’arrêtera là pour éviter de sombrer dans l’énumération du champ lexical complet de la dithyrambe.
Dire qu’en un sourire carnassier Alan Alda devient Arnold Vinick est, je vous l’accorde, un joli poncif descriptif mais une expression proche de la réalité : Vinick est un combattant charismatique, un meneur d’hommes dont on sent l’ambition et la passion. Alda est Vinick.
Quand Alda bafouille ou hésite lors de l’épisode 7.07 tourné en direct, on se dit « Vinick bafouille, Vinick vient de se faire coincer. »
Quand Jimmy Smith bafouille ou hésite, on se dit « Qu’est-ce qu’il joue mal le pote de Sipowicz ! »
Avoir un grand acteur pour jouer le nouveau président des Etats-Unis, c’est suffisant pour que les Républicains aient mon vote.
3) Arnold Vinick n’a pas de femme
La seule petite faiblesse de la candidature de Vinick pourrait être son entourage.
Naturellement, il est moins étoffé que celui des démocrates. Mais c’est son staff de campagne, c’est normal. De plus, il est plutôt attractif. Qui résisterait à un mix de « Papa Bricole » et de « Falcon Crest » avec un zeste de « Newsradio » ?
Patricia Richarson est une solide directrice de campagne avec suffisamment de poigne et de personnalité pour être un personnage dont le développement au sein d’une administration républicaine pourrait être intéressant.
Avec son passé de méchant de prime time soap (dans « The Mountain » récemment), Brett Cullen fait un vice-président pro-life à bon potentiel.
Quant à Stephen Root qui apparaît dans quelques épisodes comme conseiller, je pense qu’il s’agit d’une rampe de lancement pour l’arrivée de la distribution complète de « Newsradio » à la maison blanche. On ne serait pas bien dans le bureau ovale avec Alan Alda, Dave Foley, Vicki Lewis et Maura Thierney ?
Du point de vue personnel, Vinick est veuf. Pas de Stockard Channing-bis en perspective. Mais la mort de sa femme a conféré au personnage une position par rapport à la religion et le pouvoir assez originale.
“One Christmas my wife gave me a very old edition of the King James Bible --- 17th century. It was a real find for a book collector. It was a thrill just to hold it. Then I read it.... the more I read it, the less I could believe. I could not believe there was a God that said the penalty for working on the Sabbath was death. I couldn’t believe there was a God who said the penalty for adultery was death.... I couldn’t believe there was a God who had no penalty for slavery. The Bible has no problem with slavery at all. Lincoln could have used a little help from the Bible. ” 6.20 - Arnold Vinick
“ What ever happen to separation of church and state ? ” 6.20 Vinick à Bartlett.
Ces lignes de dialogues (dans une scène mémorable entre Alda et Sheen dans une cuisine) sont suffisantes pour que les Républicains aient notre vote.

Alors, républicain vraiment ?
Pourtant, au final, Santos ou Vinick, ce n’est pas si important que cela. Non pas parce que cette saison semble être la dernière, mais parce que la destination importe peu, c’est le chemin qui captive. Une série qui déçoit après quelques saisons, c’est malheureusement trop fréquent, en revanche, une série qui sait se réinventer et redevenir aussi captivante qu’au premier jour mérite qu’on s’y attarde. Surtout, on ne peut imaginer un meilleur hommage que la série pourrait faire à John Spencer décédé en décembre 2005 de finir la série en beauté, au top de sa forme.
Si vous désirez en savoir plus sur la série, en plus de la liste complète des épisodes présente sur Annuséries, nous vous conseillons chaudement le guide d’A La Maison Blanche de la Série Thèque qui contient un guide complet des épisodes des trois premières saisons et une introduction signée Martin Winkler.