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21 Drum Street - En n’attendant plus du tout la saison 5 de Community

N°25: Quand Geignard rime avec Connard

Par Conundrum, le 20 juin 2013
Publié le
20 juin 2013
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Tout le monde est au courant, Dan Harmon, le créateur de Community remercié de façon très publique l’année dernière, va reprendre la barre de la série.

Et c’est une bonne chose. Il revient à sa série, c’est son droit.

“I’m not going to be a jerk about it. I know there were some great writers working on that show who bled with me for seasons one, two and three…the worst thing I can do is fart in their direction at all. […] I don’t think it would be very Community of me to negate anything. Season three was weird, season two was weird, season one was weird ; they’re all weird. So if season four was weird in a different way, season’s five job is to reveal that all four of those weird things add up to some weird hip-hop dance that when you put it on a loop, you go, ‘Oh, I get it !’”

Dan Harmon, lors de l’annonce de son retour.

L’année dernière, j’étais très heureux du choix de ses remplaçants. Je ne m’en suis pas caché. J’ai toujours aimé leurs séries et, quitte à ce que Dan Harmon soit remplacé, mieux vaut qu’il le soit par des gens talentueux plutôt que Chuck Lorre [1], par exemple. Dan Harmon, en trois ans, a profondément changé sa série, la sympathique saison une a laissé place à une série expérimentale oscillant entre le brillant et le pénible, comme son auteur principal.

The West Wing a connu un destin similaire où Aaron Sorkin, après une excellente saison 4, a été remplacé par un groupe de scénaristes aux C.V. impressionnants mené par John Wells d’Urgences et Southland.
Oui mais voilà, la saison 5 de The West Wing tout comme la saison 4 de Community était déstabilisante et décevante. The West Wing a laissé le temps à John Wells d’adapter la série d’un autre à sa sensibilité et à nous fournir une série qui, à défaut d’être aussi réussie et percutante qu’à ses débuts, a su être enthousiasmante. Community a fait marche arrière, et a enterré la hache de guerre avec Dan Harmon.

David Guarascio et Moses Port repartent, un an après, avec une image ternie pour avoir osé essayer de remplacer Dan Harmon. Cette saison 4 de Community n’a pas fourni assez de bons moments pour regretter leurs départs. En 13 épisodes, ils ont pris la mauvaise décision d’essayer d’émuler un auteur pour ne pas froisser un public fidèle et vocal plutôt qu’apposer leur patte.

Du traitement d’Abed, à la relation Britta et Troy en passant par Chang, beaucoup de choses sonnaient faux. Pourtant, en revoyant récemment le pilote d’Happy Family, je me suis rappelé à quel point Port et Guarascio étaient doués pour écrire des dialogues piquants pour des personnages qui savent se montrer détestables tout en laissant retranscrire un vrai esprit de famille. Ces deux hommes sont talentueux, et ce malgré l’échec qu’a été leur passage sur Community. Ils ont aussi essayé d’être respectueux du travail d’Harmon et de l’homme en lui même. Ils lui ont même proposé d’écrire le dernier épisode de la saison au cas ou celui ci aurait été le dernier de la série.

Ils quittent donc Community, discrètement, et j’espère les revoir dans leur propre série un jour, selon leurs termes. Dan Harmon revient et après avoir vu la saison qu’il refusait de regarder lors de sa diffusion originale et déclare :

"Those characters without me wasn’t fucking cool, man. It’s like flipping through Instagrams watching your girlfriend just blow everyone.”

Je vous laisse avec Google pour traduire cette belle prose d’Harmon si l’anglais vous pose problème. J’ai beau représenter "le système" aux yeux d’Iris pour avoir entretenu l’idée que Dan Harmon pouvait être remplacé et que s’il n’était pas capable d’avoir formé une équipe capable de reprendre le flambeau, c’était peut-être un bon scénariste, mais pas le meilleur showrunner qu’il soit. Mais sa phrase représente tout ce qui m’agace dans ce type.

Il a le droit d’être blessé et de ne pas le cacher. Mais le dédain qu’il affiche face au travail de scénaristes qui ont voulu respecter son œuvre avec une équipe faite de ses anciens collègues est puant. L’entendre se prendre être un chevalier face à un système qui gagne est encore plus rageant. Pour faire simple, il a un caractère difficile qui fait que ni Sarah Silverman, ni Sony n’ont réussi à travailler avec lui. Il suffit juste d’écouter le Writer’s Panel avec Neil Goldman du 24 mai 2012, l’un de ses anciens numéro 2 pour voir que le quotidien de Community ne devait pas être des plus simples.

Le manque de respect d’Harmon, que ce soit face à ses remplaçants, ses collègues ou à un acteur [2] ne colle pas à l’image de défenseur des incompris qu’il aime se donner. Quelles que soient les circonstances, que ce soit un acteur difficile ou un conflit avec le studio, ce type affiche publiquement une attitude détestable. Je ne dis pas que tous les scénaristes ou showrunners doivent répondre à code éthique particulier. Il y a sûrement des connards, et des gens encore plus aigris et odieux qu’Harmon, mais ils ne cherchent pas à s’attirer les faveurs d’un public déjà acquis sur Internet. Et il y a grand nombre de showrunners qui réussissent à travailler avec les mêmes contraintes qu’Harmon et dont la créativité et le talent ne se trouvent que renforcées par les restrictions de studio, des chaînes et ou des impératifs de production.

Mais Harmon ne s’arrête pas. C’est une homme important et il a des choses à dire ! Voici sa manière de souligner le fait que ses remplaçants n’ont pas essayé changer radicalement sa série :

"Hey could have just done a sitcom set at a community college. Over time, people would have gone, ’Well, what about paintball ? What the fuck ? What about chicken fingers ?’ But then, five episodes later, regular people would have been like, ’Oh, this is a pleasant little show set at a community college.’ And they would have beaten me. The system would have won. I would have just crawled under a bridge and pooped in a bucket, just died."

"The regular people". Super.
En gros, si vous avez apprécié sa série, félicitations, vous être le Peuple Choisi, les Méritants. Le reste d’entre nous, qui considérait sa première saison comme ’a pleasant little show set at a community college’ et qui, de saison en saison, ont commencé à être agacés par les défauts d’écriture d’Harmon le Grand, nous ne sommes pas les bienvenus, sa série n’est pas pour nous. Community selon Harmon, c’est un peu comme la France selon Sarkozy : tu l’aimes ou tu la quittes.

Mais Harmon le Magnifique est grand seigneur, il réussi à complimenter les gens qui ont voulu continuer son oeuvre pendant qu’il touche des royalties, et continue de donner du travail à l’équipe de production et des acteurs qu’il a engagé, qui lui a permis d’avoir une série où il pouvait revenir en grande trombe :

I think they tried their best and I think that was the best idea – not the best idea, as it turns out, but the most admirable kind of impulse. It’s like, ’Let’s not let these people down. If there’s anything else we do, let’s not let these people down’ …

Cela aurait été plus cool, si ce n’était pas au milieu d’une diatribe insultante empreinte de dédain. Mais Harmon est libre de penser et dire ce qu’il dit. Et Community sera surement mieux l’année prochaine avec lui. Tout le monde était heureux de le revoir y compris, ceux qui, comme moi, n’avait rien contre son départ en premier lieu. Son attitude humble où il avait annoncé qu’il ne dirait pas de mal de la série en son absence, permettait de repartir sur de bonnes bases. Mais au lieu de cela, il a réussi a ruiner toute l’impatience que j’avais à le voir à nouveau commandes de sa série. Je vais juste attendre le retour de Port et Guarascio en me faisant une intégrale d’Happy Family et regarder The Big Bang Theory avec le reste des ’regular people’.

Conundrum
P.S. Depuis, Dan le Humble s’est excusé... du fait que ses propos ont été entendu. Ah quel chic type, ce Dan.
Notes

[1Qui sans le bien sympathique Bill Prady des Muppets et de Gilmore Girls ne sait pas faire de bonnes sitcoms

[2Suite à un conflit avec l’acteur, il a invité, lors de la soirée de fin de saison tout le public à insulter Chevy Chase devant la présence des filles de ce dernier.