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Dossier - Présentation des Emmy Awards 2006, première partie

Awards 2006 (1/3): Analyses - Chronologie - Real-TV

Par Jéjé, le 21 août 2006
Par Jéjé
Publié le
21 août 2006
Saison Emmy
Episode Emmy
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A pErDUSA, on ne recule devant rien pour plaire. On va même jusqu’à concevoir, préparer, et écrire ( !), un dossier spécial sur la cérémonie des Emmys. Juste pour s’entendre dire qu’on a fait un super boulot.
Depuis l’annonce du règlement dit de « Lauren Graham » pour les dernières nominations des Emmys, notre curiosité envers cette cérémonie a été des plus aiguisées. On s’est dit qu’il y avait sûrement beaucoup à dire (et beaucoup de choses intelligentes avec un peu de chance).

Jéjé, notre spécialiste des Emmys à pErDUSA, s’est fendu d’un texte d’analyse sur les jurys restreints de cette année. Et pour ceux qui voudraient bien briller en société et pouvoir dire qu’Alan Alda a gagné un Emmy en tant qu’acteur, scénariste et réaliste, Jéjé a également préparé un historique des événements marquants de cette cérémonie, de ses débuts jusqu’à nos jours. Et puisqu’on ne refait pas, Jéjé a également conjugué ses deux sujets préférés : les Emmys et la real-tv !

Toute la rédaction a participé à la description de nos catégories préférées et à l’analyse (avec pronostic) des épisodes retenus pour espérer gagner. Trois catégories sont mises en avant : actrices, acteurs et séries. Elles seront publiées tout au long de cette semaine.

Last, but not least, pErDUSA vous réserve une surprise de taille : deux célèbres critiques américains, Robert Bianco de USA Today et Ray Richmond du Hollywood Reporter ont accepté de répondre à nos questions concernant les dernières nominations des Emmys et plus généralement, le rôle actuel des critiques. Les interviews seront publiées jeudi et vendredi, en anglais et en français.

ANALYSE - CHRONOLOGIE - LES EMMYS ET LA REAL-TV


EMMYS 2006
Les espoirs déçus des jurys restreints.

Les réactions des critiques et des internautes aux nominations des Emmys 2006 furent très glaciales, parfois agressives. Loin des remarques désabusées des années précédentes.
Un changement d’attitude qui a autant à voir avec la liste qu’avec l’espoir déçu de changement qu’avait fait naître la modification du processus de sélection des nominations.
En effet, cette année, pour la première fois depuis la création des Emmys, les nominations dans les catégories les plus prestigieuses ne sont pas le résultat brut des votes de l’ensemble des membres de l’Académie. Les choix finaux ont appartenu à des ‘jurys restreints’ (‘blue panel ribbons’).

Comment expliquer que ces ‘jurys’ aient pu nourrir de telles espérances de renouveau ?
Et comment ont-ils pu ne pas être la solution miracle tant attendue ?

Des prétendants toujours plus nombreux

Depuis quelques années, la production de séries ambitieuses n’est plus l’apanage des trois grands networks et de HBO. Ce n’est pas à pErDUSA que l’on va dire le contraire : qui de chez nous ne donnerait pas l’ensemble de la grille des séries de CBS (et même d’ABC) pour un seul épisode de Felicity, de Buffy, de Battlestar Galactica, de Rescue Me ou de Veronica Mars ?
Cependant, les séries de ce que l’on peut appeler les petits networks n’ont jamais réussir à franchir le cap des nominations aux Emmys, du moins dans les catégories prestigieuses.

Cette situation peut s’expliquer par la quantité de matériel éligible. Il est inimaginable que l’ensemble des votants de l’Académie puisse avoir une vision exhaustive des dizaines de milliers d’heures qui forme une saison télévisuelle. Les programmes les plus regardés dans l’année ont donc plus de chance d’obtenir des votes. C’est une difficulté inhérente au média lui-même, et qui ne se pose pas pour la première fois dans l’histoire des Emmys.

Cette année là...

En 1964, CBS et ABC, lassés par vingt ans de résultats hyper prévisibles, menacèrent de jeter l’éponge et de ne plus proposer leurs programmes au vote de l’Académie.
Celle-là offrit alors à Rod Serling, le créateur de The Twilight Zone/La Quatrième Dimension, carte blanche pour sauver la situation. Il décida que les votants ne pourraient plus se prononcer sur ce qu’ils n’avaient pas vu ; il créa donc des ‘jurys restreints’, dont les membres, sélectionnés au sein de l’Académie, seraient réunis sous stricte surveillance dans des hôtels les week ends pour évaluer des échantillons de l’année télévisuelle.
A l’époque, Serling vint aussi avec l’idée de fusionner les catégories et de laisser le nombre de nominés et même de gagnants à l’appréciation des jurys.
Dans la catégorie ‘Outstanding Individual Achievements in Entertainment - Actors and Performers/ Meilleures Performances de divertissement’, il y eut 5 vainqueurs pour 13 nominations, une catégorie dans laquelle Dick Van Dyke, pour sa sitcom, et Leonard Bernstein, pour avoir dirigé une série de concerts, furent récompensés. On aurait pu voir en 2006 se côtoyer Stephen Colbert, Céline Dion, Donald Trump, Lauren Graham et Stockard Channing sur le podium.
Passé son aspect fourre-tout, ce genre de catégorie a pour avantage de ne pas construire des barrières trop figées, comme le fait la dichotomie drame/comédie. Les dramédies comme Gilmore Girls, Desperate Housewives ou Boston Legal sont clairement désavantagées avec les catégories actuelles.
Toujours est-il que cette cérémonie fut un désastre, Serling fut remercié, mais, chose importante, les ‘jurys restreints’ perdurèrent.

Grandeur et décadence

Et de 1965 à 1999, la sélection des gagnants opéra sous leur principe et les Emmys y gagnèrent leur respectabilité.

En 1971, alors qu’il avait refusé son Oscar pour son rôle dans Patton plus tôt dans l’année, George C. Scott accepta son Emmy pour le téléfilm The Price, d’Arthur Miller. Pour lui, les Oscars n’étaient qu’ « un concours dégradant de popularité entre acteurs » (tous les comédiens membres de l’Académie des Oscars votent dans cette catégorie), alors que les Emmys, avec leurs jurys restreints, étaient un reflet plus proche de l’excellence des performances.

Les Emmys récompensèrent ainsi au cours des années des séries peu regardées, de Taxi à Pickets Fences en passant par Arrested Development, en donnant un sérieux coup de pouce aux audiences de certaines : Cheers et Hills Street Blues sont les exemples les plus marquants, mais il est probable que les carrières de Mission : Impossible, The Practice, Thristysomething ou St Elsewhere n’auraient pas été les mêmes sans leurs statuettes.

L’Emmy attribué à Tyne Daly en 1983 n’est sûrement pas pour rien dans la décision de CBS de ressusciter Cagney et Lacey, qu’elle avait annulée au terme de sa première saison.
Cette dernière anecdote qui illustre la pertinence des résultats des Emmys contient également les prémices de leur lente perte d’acuité.
Tyne Daly est devenue un symbole des Emmys. Ce statut, plus que ses performances dans Judging Amy, explique pour une grande part qu’elle ait été nominée pour chacune des six saisons de la série (2000-2005), et qu’elle ait même gagné en 2003.

A partir des années 1990, les Emmys ont commencé à avoir des difficultés à se renouveler, (une victoire une année assurant quasiment des nominations automatiques pour les années suivantes) et à donner l’impression (peut être erronée) de ronronner et de s’essouffler, bref d’être une Académie vivant sur le prestige de son passé.
En 1995 et 1996, les nominations pour meilleur drame et meilleure comédie furent exactement les mêmes : NYPD Blue, Chicago Hope, ER, Law & Order et X Files d’un côté, Frasier, Friends, Larry Sanders Show, Mad About You, Seinfeld de l’autre. Pas de raison fondamentale de s’offusquer, ces séries étaient à cette époque dans leurs meilleures saisons. Mais le côté ‘poids lourds inamovibles’ de certains (Frasier, Kelsey Grammer, Law & Order, Dennis Franz, Helen Hunt...) a finit par éclipser leurs qualités réelles et à rendre plus criante l’absence des autres : Lauren Graham et Buffy sont les fers de lance des injustices des Emmys.

Fin des jurys restreints

En 2000, le système des jurys restreints est abandonné, plus à cause de l’évolution technologique que par volonté de changer véritablement les choses. Séquestrer les membres des jurys des week ends entiers alors qu’ils pourraient regarder les programmes à évaluer sur leur lecteur DVD de salon parait un peu extrême.
C’est l’occasion avec le passage des votes à domicile de multiplier le nombre de votants et d’apporter du sang neuf (la plupart des membres des jurys restreints étaient soit des retraités, soit des personnes sans emplois).
Le revers de cette médaille était d’aboutir à célébration des séries les plus populaires. Il n’en fut rien : cette année là, The West Wing gagne pour la première fois, tout comme Will & Grace.
Mais les cérémonies suivantes ne tinrent pas les promesses d’un renouvellement accru des gagnants, The West Wing et Will & Grace devenant les nouveaux poids lourds indélogeables.

La ‘Lauren Graham rule’

Cependant, le problème ne vient pas du processus de sélections des gagnants, mais bien de celui de désignation des nominations.


Pour tenter de les ouvrir aux séries des nouveaux horizons du paysage télévisuel et regagner sa légitimité, avec l’espoir que de nouvelles règles permettent de voir Lauren Graham (devenue l’emblème des laissés pour compte des Emmys) enfin reconnue, l’Académie a décidé cette année de ressortir son fameux joker.
Et cette fois, de faire intervenir les jurys restreints en première ligne. Enfin, en deuxième première ligne.

Une première liste de nominations pour les catégories principales fut obtenue par vote populaire des membres de l’Académie (chaque membre ne votant que dans les catégories qui correspondent à son secteur d’activité, les réalisateurs votent pour les nominations concernant... les réalisateurs ; il n’a que pour les catégories ’meilleur drame’ et ’meilleure comédie’ que tout le monde se prononce). Les dix premiers noms pour les catégories ‘meilleur drame’ et ‘meilleure comédie’, les quinze premiers pour les catégories ‘acteurs/actrices’ furent ensuite proposés à des jurys restreints (composés non seulement d’acteurs, mais aussi de réalisateurs et de directeurs de casting), qui, de retour à l’hôtel, décidèrent des nominations finales.

Mais le sort de nombreuses séries était déjà joué : Gilmore Girls, Veronica Mars et Battlestar Galactica n’étaient pas dans les TOP 10 proposés aux jurys [1].

Ce nouveau système a permis aux séries annulées (et non pas dans leur dernière saison) de faire une apparition remarquée et de reconnaître de nouveaux acteurs (parmi des séries populaires des grands networks), mais il a clairement échoué dans sa tâche de faire émerger les programmes des ‘petites’ chaînes (leur seul représentant dans les catégories phares est Denis Leary en lice pour ‘Meilleur Acteur dans un rôle principal(drame)’.

Un objectif pertinent ?

On peut se demander cependant si le but de cette cérémonie est vraiment de récompenser l’excellence parmi l’ensemble du panorama télévisuel en constance expansion.
Si les résultats des Emmys veulent être pertinents et significatifs, ils ne peuvent se passer d’une résonance publique forte et donc la cérémonie se doit d’être un succès d’audience.
The Wire, Battlestar Galactica, Veronica Mars, Six Feet Under et The West Wing auraient fait de beaux concurrents dans la catégorie ‘meilleur drame’, mais quelle portée aurait une révélation du gagnant devant une audience inférieure à celle d’Arrested Development ?
Cet équilibre à maîtriser entre l’intérêt du public et la rigueur des choix est une contrainte qui ne peut être négligée.

Une contrainte moins difficile cependant à résoudre que celles des échantillons des programmes à proposer aux votes.
L’Académie a donc comme règle que chaque postulant à une nomination ne peut soumette qu’un épisode à ses membres. La règle est la même, que l’on soit acteur, scénariste, ou bien producteur d’une série. Un seul épisode. Un seul DVD.
Il paraît inimaginable qu’en soit proposé plus. Comment les votants pourraient-ils avoir le temps de tout visionner ? Malheureusement, ce système élude tout l’intérêt particulier des séries par rapport aux autres formes de fictions : la durée. Une série réussie est une série de qualité constante pendant une saison, un bon acteur dans une série délivre une performance sur une année.
De plus, les feuilletons ont pris le pas sur les formula shows : il est maintenant assez ardu pour de nombreuses séries récentes de pouvoir apprécier un épisode à sa juste valeur avec un visionnage ponctuel, à l’unité... Comment les votants des Emmys pourraient-ils apprécier Gilmore Girls s’ils n’en voient qu’un épisode par an ?
L’évaluation ne devrait donc pas se faire en fin de saison, mais tout au long de l’année.

Les seules séries à recevoir ce traitement par une majorité des membres de l’Académie sont celles qu’ils ont regardées pour leur plaisir. Donc les séries les plus populaires.
Ainsi, quand Lost gagne l’Emmy du meilleur drame, on peut supposer que c’est la série dans son ensemble qui a été récompensée, mais quand Michaël Chiklis obtient l’Emmy du meilleur acteur pour The Shield, il est récompensé non pour son travail sur la saison entière mais pour l’épisode qu’il aura envoyé à l’Académie.

Denis Leary et Christopher Meloni sont extraordinaires dans les épisodes qu’ils ont proposés. Malheureusement, ces épisodes ne sont pas représentatifs de leur travail sur l’année : il s’agit du season finale de Rescue Me dans lequel le personnage de Leary voit son fils de 10 ans mourir sous ses yeux renversé par une voiture et d’un épisode de L&O :SVU inhabituellement centré autour d’un seul personnage, celui de Meloni.
Moins que l’excellence du jeu des acteurs sur la durée, c’est la stratégie dans le choix de l’épisode proposée qui est récompensée.
Mais il faut bien un processus de sélection, et celui là paraît le moins injuste.

Ainsi, l’arrivée des jurys restreints dans le processus des nominations, le système qui a fait la gloire et la respectabilité des Emmys, était-il de nature à créer un espoir de changement radical. Mais, les données ne sont plus les mêmes qu’il y a vingt ans : les programmes ambitieux et de qualité sont encore plus nombreux, dans des niches aux quatre coins de la galaxie télévisuelle américaine et sont tous pour la plupart des feuilletons... Des obstacles qu’un coup supposé magique de jurys restreints n’aura pas réussi à faire disparaître.

Mais qu’en est-il vraiment de ces nominations 2006 ? Et quelles sont les chances des nominés ?
Chaque jour, pErDUSA décortiquera une catégorie en analysant les épisodes proposés par les nominés, et vous donnera ses prévisions.

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CHRONOLOGIE

1946
Syd Cassyd, écrivain et journaliste à Los Angeles, fonde l’Academy of Television Arts and Sciences (ATAS), un centre de documentation où sont archivés les écrits sur l’histoire de la télévision.

1947
L’ATAS s’organise en association à but non lucratif, avec comme objectif principal de « promouvoir les aspects culturels, éducatifs et de recherche de la télévision. »
[Mais, ça me rappelle les statuts d’une association française beaucoup plus récente... Avec un secrétaire beau, sexy, intelligent et drôle ! C’est comment déjà le nom ?]

1949
Le 25 janvier, les six premières récompenses décernées par l’ATAS sont remises à l’Hollywood Athletic Club de Los Angeles.
Seuls les programmes produits à Los Angeles et diffusés sur les 4 chaînes de télévision de la ville étaient éligibles.
Shirley Dinsdale, une ventriloque de 20 ans, reçoit le premier Emmy (bien que les récompenses ne portent pas encore ce nom, le terme sera inventé au cours des années 50 par Harry Lubcke, de la Society of Television Engineers, à partir du mot Immy, qui désigne un de tubes présents dans les caméras de télévision de l’époque).
Louis McManus reçoit une plaque au cours de cette cérémonie pour avoir créé le design de la statuette dorée : une femme ailée (modelée sur sa femme, Dorothy) portant à bout de bras le symbole de l’électron.

1951
Red Skelton accepte son Emmy le consacrant ‘meilleur comique’ en déclarant : « Je pense qu’il aurait du être attribué à Lucille Ball. » (La première saison de I love Lucy venait d’être diffusée sur CBS)

1954
Seule année où les Emmys ne sont pas diffusés à la télévision.

1955
Les récompenses sont remises en alternance au Moulin Rouge Night Club de Los Angeles et au Nino LaRue’s Restaurant de New York, causant parfois des blancs d’une minute dans la retransmission de la cérémonie (pour la première fois sur l’ensemble du territoire américain).
Cette structure bicéphale fut instaurée en réponse à la rivalité qui existait entre Los Angeles (où étaient tournée et enregistrée la plupart des séries) et New York (où étaient tournés les programmes en direct : informations, jeux, soap opéras).

1957
Ed Sullivan (le présentateur du célèbre Ed Sullivan Show, dans lequel Elvis Presley et les Beatles ont fait leurs apparitions à la télévision américaine) et les cadres de Manhattan forcent l’Académie à créer une deuxième groupe décisionnel basé à New York, la National Academy of Television Arts and Siences (NATAS). L’ATAS et la NATAS forment ensemble l’Académie des Emmys.

La cérémonie est retransmise en couleur pour la première fois.

La rivalité atteint un tel degré à cette époque et dans les années 60 que les Emmys deviennent une compétition entre les stars et les programmes des deux villes. A la suite de la cérémonie de 1957, le Daily’s Variety titre : « New York écrase Hollywood 15 à 4 ».

1959

An evening with Fred Astaire, le premier programme en couleur et enregistré gagne les neuf Emmys auxquels il pouvait prétendre.

Huckleberry Hound est la première série animée à remporter un Emmy.

1964
Les rédactions de l’information de CBS et de ABC boycottent les Emmys. La rédaction de CBS continuera le boycott pour les deux éditions suivantes.

1968
Les Emmys pour des acteurs dans un rôle principal sont attribués aux quatre mêmes personnes qu’en 1967 : Bill Cosby (I Spy), Barbara Bain (Mission : Impossible), Don Adamas (Get Smart), and Lucille Ball (The Lucy Show)

1970
My World and Welcome to It est la seule série à avoir été annulée à la fin de sa première saison et à obtenir l’Emmy de la meilleure comédie.

1972
Deux cérémonies sont organisées : le 6 mai se tient la cérémonie ‘News & Documentary’, le 14 la cérémonie ‘Entertainment’.

1975
Les scénaristes et les réalisateurs boycottent les Emmys quand ils apprennent que les remises de leurs récompenses ne seront pas télévisées.

1976
Alors qu’Hollywood a finalement triomphé de New York, que les programmes enregistrés occupent la majorité des catégories et gagnent le plus de récompenses, que les Californiens sont au postes clés de l’Académie, John Cannon, le candidat soutenu par la NATAS, est élu président.
Les Californiens démissionnent et déclarent vouloir créer une nouvelle association.

1977
Suite à de nombreux procès, l’ATAS et la NATAS se mettent d’accord pour continuer à fonctionner ensemble.
La NATAS (New York) organisera les cérémonies récompensant les programmes de la journée, ceux d’informations et de sports, ainsi que les cérémonies locales et internationales.
L’ATAS, nouvelle version, organisera les cérémonies récompensant les programmes de prime-time, c’est-à-dire la cérémonie que tout le monde connaît comme celle des ‘Emmys’.

1979
Alan Alda va chercher son Emmy pour ‘meilleur scénario’ en faisant une roue dans l’allée.
Il est le seul à avoir obtenu des Emmys à la fois en tant qu’ acteur, réalisateur et scénariste.

1980
A l’appel de la Screen Actors Guild et de l’American Federation of Television & Radio Artists, la plupart des acteurs boycotte la cérémonie : ils ont entamé une grève qui durera sept semaines pour la revalorisation de leurs salaires.
Seul Powers Boothe (Cy Tolliver, dans Deadwood) ira chercher son Emmy, en déclarant : « Il s’agit soit du moment le plus courageux de ma carrière, soit du plus stupide. »

1987
Les programmes du câble concourent pour la première fois pour les Prime Time Emmys.

La cérémonie, diffusée pour la première fois sur FOX, est la plus longue de l’histoire : 3h59.

1988
En ratant l’Emmy pour la meilleure coiffure, Dynasty perd sa dernière chance d’obtenir la moindre statuette mais gagne le titre du programme le plus nominé (24 nominations) sans jamais avoir gagné une seule fois.

1998
Frasier devient la première comédie à obtenir cinq fois d’affilé l’Emmy de la meilleure série.

2001
A la suite des attentats du 11 septembre, la cérémonie, prévue initialement le 16 septembre, est repoussée de trois semaines.
Alors qu’elle devait avoir lieu le 6 octobre, elle est annulée le jour même, jour du début de la campagne de bombardements américains en Afghanistan.
Les Emmys se déroulent finalement le 4 novembre.

2004
Les catégories ‘Programme de télé réalité’ et ‘Programme de télé réalité de compétition’ sont créées : Queer Eye for A Straight Guy et The Amazing Race remportent les statuettes.

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LES EMMYS ET LA REAL-TV

Cette année, les programmes de télé réalité concourent dans deux catégories :

- ‘Outstanding Reality-Competition Program’, pour les émissions qui reposent sur un principe de jeu avec élimination progressive des candidats. C’est la catégorie de Survivor et de The Amazing Race. Le gagnant sera révélé lors de la cérémonie télévisée du 28 août.

- ‘Outstanding Reality Program’, pour les émissions qui, pour faire simple, filment des personnes dont les dialogues ne sont pas écrits et qui ne sont pas sensés jouer un rôle. C’est la catégorie de Queer Eye for A Straight Guy et de Extreme Makeover. L’Emmy a déjà été remis lors de la cérémonie des Creative Arts Emmys du 19 août.

Mais la situation n’a pas toujours été aussi si claire.


La télé réalité, jeu ou documentaire ?

En 2000, le phénomène Survivor lance l’explosion de la real-tv aux Etats-Unis.
Comme tout programme télévisé, l’émission de Mark Burnett est en droit de concourir dans la course aux Emmys. Mais à quel titre ?
Les Emmys ne sont pas décidés à créer une catégorie dédiée seulement à un éventuel nouveau genre comme l’ont fait dès 2001 des cérémonies moins prestigieuses comme les Teen Choice Awards (Choice Reality Show) ou les People Choice Awards (Favorite Reality Based Television Program).
Les Emmys ne sont pas prompts non plus à laisser le phénomène médiatique de l’année concourir dans la catégorie ‘Outstanding Game Show’, car celle là appartient à la branche new-yorkaise des Emmys, la NATAS (voir Historique des Emmys : 1977) et fait partie des ‘DayTime Emmys’. (C’est pour cette raison que Who wants to be a Millionnaire, pourtant diffusé en primetime durant la période 1999-2001, fut nominée dans la cérémonie célébrant les soaps et les talk dhows de l’après de l’après midi).

Ainsi, l’Académie californienne, décide-t-elle d’ouvrir aux émissions de real-tv les catégories ‘Non-Fiction Program’, celles où sont récompensés habituellement les séries et films documentaires ! (Il faut croire que les Emmys ont pris très au sérieux l’appellation ‘réalité’ !)
Pour la cérémonie de 2000, il en existait deux :
- ‘Outstanding Non-Fiction Series’
- ‘Outstanding Non-Fiction Special’
En 2001, on passe à quatre, avec deux petites nouvelles :
- ‘Outstanding Non-Fiction Series’
- ‘Outstanding Non-Fiction Special’
- ‘Outstanding Non-Fiction Program (Special Class)’
- ‘Outstanding Non-Fiction Program (Reality)’

Les émissions de ‘real-tv de compétition’ sont nominées dans la catégorie ‘Special Class’ (que Survivor remporte) alors que la catégorie ‘reality’ est ouverte à beaucoup d’autres choses : on y trouve la série satirico-documentaire de Michael Moore The Awful Truth et la série E ! True Hollywood Stories. (L’Emmy est remporté par American High, un docu-soap qui suit des lycéens pendant toute une année)

L’année suivante, seule la catégorie ’Outstanding Non-Fiction Program’ (Reality) est garde son titre et voit la victoire de The Osbournes sur par exemple Project Greenlight. Ici, les programmes nominés commencent à correspondre à ce qui est annoncé.
Les deux catégories ‘Non-Fiction’ originelles sont restreintes aux documentaires sur l’actualité (la cérémonie a lieu un an après les attentats du 11 septembre) et deviennent :
- ‘Outstanding Non-Fiction Series (Informational)’
- ‘Outstanding Non-Fiction Special(Informational)’.
De son côté, ‘Outstanding Non-Fiction Program (Special Class)’ élargit son champ de recrutement, est rebaptisée ‘Outstanding Special Class Programm’ et devient une véritable catégorie fourre-tout où sont nominées manifestement les émissions que ne pouvaient pas l’être ailleurs.

Survivor se retrouve alors en compétition avec The West Wing Documentary Special, un documentaire de 45 minutes sur... The West Wing (qui gagne l’Emmy !), I Love Lucy’s 50th Anniversary Special, un documentaire hommage à la série de Lucy Ball, AFI’s 100 Years, 100 Thrills : America’s Most Heart-Pounding Movies, une émission qui fait le classement des 100 meilleurs thrillers et Trading Spaces, une émission à deux couples s’affrontent dans des épreuves de décoration d’intérieur !!!

John Leverence, vice president de l’ATAS, reconnaîtra l’aspect ‘auberge espagnole’ de la catégorie : "Last year, reality programming fell into a special class area, which was essentially an orphanage for programming that didn’t have a home in the competition".

Et donc, en 2003, l’Académie chamboule à nouveau le champ ‘Non-Fiction’ !
‘Outstanding Non-Fiction Special’ et ‘Séries’ (Informational) deviennent Outstanding Non-Fiction Special et Series (Traditionnal). [La télé américaine s’est apparemment remise du 11 septembre !]
Il n’existe plus qu’une seule catégorie ‘Outstanding Non-Fiction Program’ dont les programmes sont alors qualifiés d’ ‘Alternative’. On y retrouve The Osbournes, ancien de ONFP (Reality) et Trading Spaces, ancien de ONFP (Special Class), mais pas Survivor. C’est un docu-soap sur le Cirque du Soleil qui gagne l’Emmy.

Mais enfin est créée la catégorie ‘Outstanding Reality/Competition Program’.
The Amazing Race (le gagnant), American Idol et Survivor ont enfin leur propre maison. Enfin presque, puisqu’elle est encore le refuge des sans catégories fixes, puisqu’à leurs côtés on retrouve deux émissions de classements, 100 Years of Hope and Humor et AFI’s 100 Years... 100 Passions !

2004, l’année de la reconnaissance

Enfin, c’est en 2004 que la real-tv quitte définitivement le giron des ‘Non-Fiction’, qui retrouve ses deux catégories originelles :

- ‘Outstanding Non-Fiction Series’.
- ‘Outstanding Non-Fiction Special’, alors que deux catégories spécifiques sont créées :
- ‘Outstanding Reality-Competition Program’ (remportée par The Amazing Race)
- ‘Outstanding Reality Program’ (remportée par Queer Eye for A Straight Guy)

Ces deux dernières tiennent depuis trois ans et traduisent une perception satisfaisante des nouveaux genres qu’a introduit dans le paysage audiovisuel américain l’explosion de la télé réalité il y a six ans.
Les tâtonnements des premières années se comprennent dans la mesure où, à ses débuts, la télé réalité pouvait apparaître comme un phénomène ponctuel appelé à disparaître, d’autant plus que mis à part l’exception notable de Survivor ses émissions avaient très mauvaise presse et étaient considérées comme une menace pour les fictions traditionnelles. Si les cadres de l’Académie ont très tôt ouverts la porte à la real-tv, ses membres n’en étaient cependant pas tous de grands admirateurs.
Lors de la cérémonie de 2004, Garry Shandling, son présentateur, avait accumulé les attaques acerbes contre ce nouveau genre mais l’un des moments les plus touchants de la cérémonie avait eu lieu lors de la remise du trophée pour ‘Outstanding Reality-Competition Program’.
En effet, les deux présentateurs pour la catégorie étaient deux anonymes qui avaient postulés pour participer à la cérémonie. Quelques heures auparavant, la production avaient été les chercher chez eux sans leur dire quoi que ce soit, leur avaient bandé les yeux et les avaient seulement « libérés » sur la scène du Shrine Auditorium pour remettre l’Emmy.

Garry Shandling entouré des deux présentateurs ’anonymes’

La sincérité de leur explosion de joie fut ovationnée (dans une cérémonie où les larmes des vainqueurs sont souvent sujettes à caution, après tout il y a beaucoup d’acteurs récompensés !)et fut peut être l’un des meilleurs avocats auprès des membres des Emmys.
Ainsi, magré tout, les Emmys auront-ils été assez rapides à intégrer la télé-réalité et à en célébrer le meilleur, une reconnaissance utile pour l’assimilation sereine de ce genre à la culture populaire contemporaine.

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Emmys 2006 : la compétition

Qu’en est-il cette année pour les émissions de télé réalité de compétition ?

Peu d’informations ont transpiré pour cette catégorie, seuls les titres de deux épisodes soumis à l’Académie (l’un pour The Amazing Race, l’autre pour Project Runway) sont connus avec certitude.

The Amazing Race - 9.08 - Here comes the Bedouin

L’épisode en (presque 47 mots) : Après un arrêt sur les îles grecques, les cinq équipes encore en lice partent pour le Sultanat d’Oman... Palaces, désert et chameaux sont au programme !

Pourquoi cet épisode ? Parce qu’il n’appartient pas à l’abominable ‘Family Edition’ !
Les enfants et la quasi absence d’épisodes à l’extérieur des USA avaient annihilé tout l’intérêt du concept. Et même pour un cynique comme moi, voir des enfants éclater en sanglots à l’annonce de l’élimination de leur famille ne m’a procuré aucune joie.
L’épisode soumis fait partie de la saison suivante (The Amazing Race comme Survivor ont deux saisons de diffusées par an), celle du retour aux sources, et possède tous les ingrédients qui ont fait le succès de l’émission : des paysages grandioses, des équipes charismatiques (les hippies et les ‘frat boys’ en tête...), d’autres dysfonctionnelles, des épreuves amusantes...

Ses chances ? Plutôt très bonnes ! Avec des épisodes de ce style, Amazing Race a remporté l’Emmy depuis la création de la catégorie. Pas de véritable raison que ça change, surtout que les vainqueurs de cette manche (le couple de retraités si cher au cœur de Feyrtys) ont le même âge que la majorité des votants !

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Project Runway - 2.02 - Clothes off your back

L’épisode (en presque) 47 mots : Les nouveaux apprentis couturiers doivent réaliser une robe de soirée avec pour seul matériel les vêtements qu’ils portaient à la soirée célébrant le début de la saison.

Pourquoi cet épisode ? Son défi est très spectaculaire et il est aisé de voir les qualités de certains en comparant les vêtements de départ et le résultat à l’arrivée. Tim Gunn, le superviseur des concurrents pendant les épreuves, est dans cet épisode sensationnel, à la fois sincère et autoritaire. « Make it work ! » « Carry on ! »

Ses chances ? Probablement le concurrent le plus sérieux de The Amazing Race.
Pas uniquement grâce à cet épisode, qui met quand même beaucoup de temps à démarrer : il s’écoule près de dix minutes avant l’annonce de l’épreuve, un temps perdu à suivre l’installation des concurrents dans leurs nouveaux appartements. De plus, l’effondrement larmoyant d’un candidat dans les dernières minutes est assez pathétique.
Mais l’émission bénéficie (à raison) d’un excellent bouche à oreille et est devenu avec cette deuxième saison le phénomène branché du moment !
Si l’Académie veut éviter les redites, son choix se portera sûrement sur Heidi - You-hou - Klum.

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American Idol - ?

L’émission qui n’en finit pas d’établir à chaque saison de nouveaux records d’audience et de votes pour ses concurrents, et qui, chaque année, rate l’Emmy.
Peut être parce qu’elle n’est finalement qu’un spectacle de variétés un peu cheap et qu’elle tire essentiellement son engouement de la tension provoquée par la course au titre et des répliques cinglantes d’un des juges.
Visionner un seul épisode ne doit pas être suffisant pour s’enthousiasmer à la manière des millions de fans.
Il est peu probable que les producteurs aient soumis un épisode des pré-sélections où des candidats, souvent désastreux, défilent devant les juges ! C’est peut être la partie la plus jubilatoire, mais le résultat visuel reste tout de même très pauvre, particulièrement en comparaison avec des émissions comme Amazing Race ou Survivor !

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Dancing With The Stars - ?

Des ‘stars’ (de la D-List chère à Kathy Griffin) s’associent à des champions de ballroom dancing et s’affrontent devant des juges et le public d’ABC. C’est encore plus laid qu’American Idol et bien moins addictif.
On peut s’étonner que l’émission ait atteint le stade des nominations à la place de The Apprentice. Mais l’essoufflement et la répétition ressentis au long de ses deux dernières saisons ont du transpirer même avec un seul épisode.

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Survivor - 11.01 - Big Trek, big trouble, big surprise

Cet épisode ? Rien n’est moins sûr ! Il ne s’agit que d’une rumeur qui circule sur le net, mais, s’elle se confirmait, elle révélerait un excellent choix. Retour inattendu de deux concurrents de la saison précédente, paysages sublimes des ruines incas, randonnée exténuante dans la jungle qui voit les hommes tomber comme des mouches (rhaa, les yeux exorbités de Bobby Jon), oui, c’est peut être le meilleur season premiere de Survivor.

Sinon ? Guatemala et Exile Island sont deux saisons plutôt réussies qui possèdent suffisamment d’épisodes jubilatoires pour que Mark Burnett en ait sélectionné un qui mette véritablement sa série dans la course cette année. Il pourrait ainsi obtenir pour la première fois un Emmy qui corresponde à son travail : la télé réalité de compétition !

Jéjé
P.S. Retrouvez, tout au long de la semaine, notre dossier spécial Emmy Awards, avec des pronostics, des analyses, et des interviews exclusives de critiques américains.
Notes

[1D’après The Enveloppe, les seules séries de ’petites chaînes’ à avoir passé le premier tour seraient Weeds et Rescue Me ! Les autres (outre celles qui ont obtenu leur ticket pour la cérémonie) seraient, parmi les comédies, Desperate Housewives, Entourage , My Name is Earl et Will & Grace, et parmi les drames, Big Love, Boston Legal, Lost et Six Feet Under.