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The Americans - Critique et résumé du sixième épisode de la série

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Par Jéjé, le 11 mars 2013
Par Jéjé
Publié le
11 mars 2013
Saison 1
Episode 6
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The Americans est une très chouette série. Une très bonne série même. Felicity et Kevin qui jouent aux Russes qui jouent aux Américains, c’est une super idée. C’est bien écrit, c’est bien joué, c’est joli, ça exploite avec intelligence le sujet, ça utilise finement le recul historique, y’a Margo Martingale qui est arrivée, c’est vraiment nickel.

Mais, pour être vraiment honnête, jusqu’ici, je ne me suis encore jamais relevé la nuit pour en revoir un épisode. Bon, je n’ai jamais fait ça pour aucune série, mais vous comprenez l’esprit…
C’était donc avec un intérêt poli que je me suis installé devant ce sixième épisode.

Et au bout de trois minutes, j’ai cessé de respirer.
Jusqu’à la moitié de l’épisode.

C’est effectivement au bout de trois minutes que Kevin, en route pour son boulot d’espion, perruqué et lunetté comme à l’habitude, se fait enlever. Il est ligoté dans un sous sol et l’un de ses kidnappeurs lui annonce que sa fausse identité a été exposée et qu’ils savent, que le monde entier sait qu’il est un agent du KGB.

J’ai ramassé ma mâchoire inférieure.

Dans le même niveau d’excitation que durant le conseil tribal de l’élimination de Ozzy dans Fans vs. Favorites, j’ai commencé à me dire qu’il y avait un problème. Sûrement traumatisé par le cliffhanger de Dallas de cette semaine, je me suis dit que c’était un rêve. Qu’à la fin de l’épisode, Felicity serait réveillé par le son de l’eau qui coule dans la douche et que Kevin ouvrirait le rideau pour lui dire bonjour.
Alors que j’essayais de rassembler mes esprits, l’ambassade russe organisait déjà la traque de la taupe qui opère en son sein. Me voici à angoisser pour Nina et et à prendre conscience que si les autres intrigues de la série avancent, Kevin n’est peut-être pas dans un rêve.
Quand quelques instants plus tard, Felicity, après une épique baston dans sa maison, se fait à son tour kidnapper.

Arrivée d’interrogations sur les raisons pour lesquelles les scénaristes auraient décidé de casser le principe de leur série si tôt dans son existence.
Mais voilà que les enfants ont décidé de faire du stop…
Ce n’est qu’au bout d’une vingtaine de minutes, épuisé, que j’ai imaginé que les Russes pouvaient être derrière l’opération "Phase One". Soit dix secondes avant que Margo Martingale n’apparaisse à l’écran.

Je pense que beaucoup l’avaient compris bien plus tôt [1].
L’important, cependant, c’est que pendant ces vingts minutes, The Americans a montré qu’elle maîtrisait aussi bien, voire mieux, qu’une autre le jeu du rebondissement viscéral, de la tension narrative, du "qu’est-ce qu’il va se passer ?", qui constitue pour moi le plaisir premier des séries télé.

Mais en général, ce niveau d’intensité arrive en fin d’épisode, voire en fin de saison.

Ce qui rend cet épisode de The Americans aussi exceptionnel (oui, soyons clair, c’est ce que j’ai vu de plus excitant cette année), c’est que cette entrée en matière n’existe pas seulement comme simple exercice de style.

Ses conséquences pour tous les personnages sont susceptibles de se développer sur le reste de la saison et, déjà, aboutissent dans cet épisode à donner à Kevin ses deux plus belles scènes depuis le début de la série : celle, immédiatement après sa "libération" où il comprend que Felicity a remis en question son adhésion totale à la cause soviétique et la dernière scène de l’épisode quand il tente de faire comprendre à sa ’femme’ que la trahison qu’elle a ressenti de la part du KGB est du même ordre que celle que lui a ressenti de sa part à elle.
La meilleure scène de Felicity correspond tout simplement au meilleur moment de toute la série, quand elle manque de noyer Margo Martindale avant de lui exploser le visage à mains nues. Je n’aurais jamais imaginé qu’une baston puisse exprimer avec autant de force la frustration et la déception ressenties par un personnage. Et pourtant, je regarde religieusement Banshee et Spartacus.

Des conséquences qui illustrent avec simplicité les deux thèmes principaux de la série (la confiance aveugle dans la cause patriotique et l’impact des secrets dans la vie quotidienne) et produisent trois intrigues qui se font écho dans une fluidité bluffante.
Le parallèle entre la chute de Vasili et les conséquences du test sur Felicity est savoureux, tout autant le clin d’oeil du secret qui lient désormais les deux enfants en regard de celui qui scelle le couple de leurs parents.
Et si cette micro-intrigue de "l’autostop", assez casse-gueule sur le papier, fonctionne, c’est d’abord parce qu’elle est un résultat "collatéral" inattendu du kidnapping dans lequel on est intrigué par la réaction des enfants.
Qu’elle rejoigne in fine un des thèmes de l’épisode est une cerise sur le gâteau, car, même sans ça (si par exemple le fils avait décidé de dire la vérité à ses parents), cette péripétie resterait intéressante du simple point de vue des personnages [2].

Mais ma conclusion préférée d’intrigue reste celle des voisins. J’ai trouvé très beau et très juste la demande de la femme de l’agent du FBI de lui dire quelque chose à propos de son travail. Sa réponse, forcément vague pour elle, lui apporte un réconfort émouvant et donne un éclairage bienvenu sur la façon dont ce personnage, pour lequel je dois l’avouer je ne m’étais pas trop souci des états d’âme, a vécu les événements de cet épisode.

Si la suite des épisodes poursuit sur cette lancée, The Americans va détrôner Banshee au titre de ma nouvelle série favorite de 2013.

Jéjé
P.S. Ce qui ne sera pas un pas mal, parce que je n’assume que moyennement d’adorer une série d’une violence inouïe et un chouïa complaisante.
Notes

[1Ju m’en a apporté la confirmation un peu amère quand on en a discuté ensemble de l’épisode.
Moi : "A quel moment tu as pensé qu’ils avaient été enlevé par les Russes ?"
Lui : "Très très vite, avant l’enlèvement de Felicity. Mais c’est bien si tu te laisses toujours emporter par ce que tu regardes, tu as su garder ton enthousiasme."

[2J’aime beaucoup quand les scénaristes utilisent la 3ème règle du "storytelling" selon Pixar.