Gone, Gone, Gone: La Série la Plus Puante de 2012
Mais ça, toute personne assez stupide (c’est mon cas) pour continuer à regarder True Blood s’en est bien rendu compte. Après tout, l’intrigue la plus regardable cette année est celle de Tara.
Si ce n’était qu’une question de médiocrité, je ne prendrai pas la peine d’écrire sur le sujet. Mais le vrai problème de True Blood aujourd’hui, et particulièrement de cette saison 5, c’est qu’à force de se croire intelligente (alors qu’elle est conne) et de vouloir aborder des thèmes sérieux (qu’elle est clairement incapable de traiter), elle est devenue l’une des séries les plus nauséabonde du moment.
Que certaines séries CBS ou ABC Family soient puantes et réac, soit. Il faut de tout pour faire un monde et, après tout, les gros cons ont bien le droit eux aussi de regarder des séries télé entre 2 pubs. Et surtout, ces séries n’avancent pas masquées et leurs messages – bien que déplaisants – sont en général assez transparents.
Quand True Blood, une série d’Alan Ball diffusée sur HBO qui se présente comme progressiste, me met mal à l’aise ou hors-de-moi par ses maladresses répétées, je trouve ça beaucoup plus gênant.
Les vampires ? Des noirs homos juifs !
Cela a été répété maintes fois, ici et ailleurs, mais le principal problème de True Blood, c’est son postulat de départ.
En faisant des vampires une minorité discriminée, que la série compare clairement (et lourdement) aux autres minorités discriminées de notre époque (qui, comme chacun le sait, subissent toutes EXACTEMENT le même type de discrimination), la série se veut porteuse d’un message de tolérance.
Mais ce message de tolérance est parasité en permanence par le besoin de la série de mettre ses personnages en danger. Pour les besoins de l’intrigue, les vampires et autres créatures surnaturelles se révèlent dans presque tous les épisodes aussi dangereux, sanguinaires et incontrôlables que l’affirment ceux qui les discriminent.
Ce problème n’a jamais été aussi présent que dans la 5ème Saison, qui atteint des niveaux hallucinants de bêtise dans les derniers épisodes diffusés.
Dans ces épisodes, un gang d’humains portant des masques d’Obama lynche des créatures surnaturelles et revendique publiquement leurs exécutions. Au cas où le lien avec le Ku Klux Klan ne serait pas clair dans la tête du téléspectateur, les scénaristes en rajoutent une couche dans le dernier épisode : le chef du gang en question est appelé un « dragon » (comme les chefs locaux du Ku Klux Klan), et un personnage formule même la comparaison à voix haute.
Pour outrepasser encore un peu plus les limites du bon goût, ce « Klan » a même un site Internet, où il revendique ses massacres en affirmant que les créatures surnaturelles sont « une menace pour les humains américains », qu’ils « volent leurs emplois », ont « infiltré les médias » et « font partie d’un grand complot pour conquérir le monde ».
Une déclaration clairement inspirée de la propagande antisémite des années 30… qui serait sûrement moins dérangeante si, dans le même épisode, l’intrigue principal ne montrait pas les créatures surnaturelles en question massacrer des humains dans des sacrifices rituels et comploter pour envahir le monde (après avoir infiltré les médias) parce qu’ils sont persuadés d’être le peuple élu d’une religion monothéiste. L’instigatrice de ce complot ? Salomé, un personnage juif tout droit sorti du Nouveau Testament !
True Blood a toujours été pleine de ces maladresses. Même les vampires « gentils » de la série sont incapables de résister à leurs pulsions plus de 5 épisodes d’affilé. Bill, Jessica, Eric et maintenant Tara revendiquent leur désir de s’intégrer tout en passant leur temps à tuer ou à violenter les humains autour d’eux. Souvent plus proches de l’animal que de l’homme, ils réclament des droits spéciaux mais sont incapables d’ajuster leur comportement comme le commun des mortels. Une belle image des minorités qu’ils sont censés représenter.
J’ai souvent excusé ces maladresses parce que True Blood n’est pas, au fond, une série politique ou réaliste. Mais peut-elle vraiment jouer cette carte de la série « à ne pas prendre au sérieux » quand elle fait aussi lourdement un parallèle entre ses créatures surnaturelles et les victimes du nazisme et du Ku Klux Klan ? Les scénaristes peuvent-ils vraiment ignorer à quels points leurs intrigues sont maladroites ? Je ne doute pas qu’ils soient en général bien intentionnés… Mais avec des amis comme les scénaristes de True Blood, franchement, pas besoin d’ennemis.
Et les gays dans tout ça ?
J’attends toujours une vraie scène de sexe gay dans True Blood, qui nous montre ses personnages hétéro en train de baiser dans des positions acrobatiques à chaque épisode, mais n’a jamais dépassé le stade de la scène « blague » entre deux hommes (Lafayette et son mec dormaient quasiment en doudoune quand on les voyait dans le même lit).
(Je parle de sexe entre hommes parce qu’il y a eu des scènes de sexe lesbien avec Tara et sa copine catcheuse. Mais franchement, je ne veux même pas m’y attaquer.)
Ha, et dans le dernier épisode, un couple de méchants gay vole un enfant (techniquement, un chiot-garou) à une redneck pour l’adopter et le traiter comme un animal de compagnie. J’avoue, ça m’a fait rire.
L’intrigue la plus nulle de tous les temps
Et si encore True Blood s’arrêtait aux vampires… Mais non ! Dans cette Saison 5, l’intrigue la plus immonde est sans doute celle de Terry.
Quand ils étaient en Irak, Terry et les soldats de son unité ont massacré un village entier de civils. Par accident. (Comment peut-on mitrailler 40 personnes par accident ? Voilà un mystère que la série ne semble pas déterminée à éclaircir…)
Réalisant que ce n’était pas bien (pour leur carrière), ils ont alors décidé de cacher leur crime… en exécutant le dernier témoin, une vieille femme irakienne. Logique ! C’est Terry lui-même – un des héros de la série - qui a tiré. Mais tout va bien, il peut rester dans le camp des gentils, parce qu’il regrette.
Comme chacun le sait les vieilles femmes irakiennes ont des pouvoirs magique (on est dans True Blood où TOUT LE MONDE sauf les WASP a des pouvoirs magique, donc passons). Terry est donc victime d’une malédiction : un Ifrit (l’invocation de niveau 1 de Final Fantasy – et une sorte de génie irakien aussi apparemment) est à ses trousses, bien décidé à le tuer.
Heureusement, dans le dernier épisode, il a réussi à lever la malédiction (en tuant le vrai responsable, le mec qui lui avait donné l’ordre de tirer), et il est sauvé.
Bref, Terry et ses hommes ont massacré 30 innocents par bêtise et par intérêt personnel. Mais la série ne s’attarde à aucun moment sur ces victimes. Seules sont traitées à l’écran les conséquences de ce massacre sur le gentil WASP américain. Car il se sent coupable, le pauvre ! Et en plus il est victime d’une malédiction !
Terry n’est pas un anti-héros dans True Blood. C’est le personnage le plus gentil de la série, avec qui nous sommes censés sympathiser dans cette intrigue. Parce que franchement, ils font grand cas d’un tout petit massacre ces Irakiens et leurs Ifrit…
No comment.
Pouah pouah pouah
Bien sûr, on va me répondre que True Blood n’est qu’un divertissement. Que la série ne doit pas être prise au sérieux. Qu’il ne faut pas y chercher un quelconque message.
Je me doute qu’il n’y a pas d’agenda politique caché derrière la série, et que ces maladresses ne sont pas réfléchies.
Mais la série devrait avoir l’humilité de réaliser que son sujet et le (manque de) talent de ses scénaristes ne lui permet d’aborder intelligemment des thèmes sensibles. En choisissant de les utiliser de façon aussi grossière, en s’obstinant à croire qu’elle peut mélanger des thèmes aussi sérieux à du grand n’importe quoi dans ce qui est clairement une série pop corn destinée à faire du fric, elle est à mon sens l’un des programmes les plus obscènes et les plus insultants de l’antenne.
Vivement le retour de Glee.
