MAD DOGS — Saison 1
Quatre garçons dans le soleil
Par Dominique Montay • 6 janvier 2012
En février 2011, Sky1 mettait à l’antenne la mini-série « Mad Dogs », un véhicule de stars, le casting étant composé de la crème de la crème des acteurs britanniques : John Simm, Max Beesley, Marc Warren et Philip Glenister. Du très très lourd. Né d’une volonté commune de ces stars de travailler enfin ensemble, écrit par Chris Cole, se déroulant sous le soleil de Majorque… de quoi alimenter beaucoup de fantasmes… et de craintes aussi…

Alvo est devenu riche. Immensément riche. Peu importe la façon, il est aujourd’hui à la retraite et pour fêter ça, il a invité ses amis de toujours, Baxter, Rick, Woody et Quinn.

Sexy Dogs

Le premier grand souci de « Mad Dogs », c’est de faire énormément penser à « Sexy Beast », excellent film sorti en 2000, avec d’autres monstres sacrés, Ray Winstone, sir Ben Kingsley et, un de mes favoris, Ian McShane. Même décor : le soleil, l’Espagne, une villa cossue. Mêmes relents d’histoires de gangsters. Même esprit. Le récit de « Mad Dogs » n’est pas très surprenant, même s’il sait se montrer efficace.

Le premier épisode est centré sur les interactions entre Alvo et ses amis, dont on a du mal à saisir la qualité de leurs relations. Alvo est tantôt amical, tantôt agressif. On a plutôt l’impression qu’il a invité ce groupe pour régler ses comptes, pas pour rallumer la flamme de leurs jeunes années. En soit, c’est assez intéressant. C’est brutal, c’est dérangeant, et le jeu outrancier de Ben Chaplin colle bien à la situation.

Mais cette attitude agressive de sa part ne mène pas à grand-chose, vu que la présence d’Alvo se limite au premier épisode, laissant énormément de questions en suspens. Au vu des épisodes suivants, on a plus l’impression que l’auteur s’est servi du personnage d’Alvo comme d’un catalyseur, un élément exterieur au groupe qui a pour but d’allumer les mèches qui mèneront à l’explosion finale. Ce n’est pas en soit un mauvais choix, mais il est dommage que ça se voit autant.

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My Diner with Alvo
"Si je vous ai tous réunis, c’est pour vous insulter"

On a souvent l’impression de se retrouver face à une pièce de théâtre filmée, les ideés de mise en scène sont assez rare (un ralenti par ci, une séquence musicale par là…). Les monologues sont assez nombreux et si certains sont puissants (et surtout très bien interprétés), d’autres se ramassent assez mollement.

Zéro stress à Majorque

L’autre grand problème de « Mad Dogs », c’est de ne pas gérer convenablement la tension. Si le premier épisode mène progressivement à un climax 4 étoiles et extrêmement surprenant (pour le coup autant dans le fond que dans la forme), les autres se perdent un peu, et on a rarement l’impression que le gang peut mourir à tous moments. Les protagonistes sont esseulés, semblent pouvoir circuler sans encombre et sans risque. On a même droit à une scène complètement surréaliste : afin de se sortir d’affaire, ils décident de déplacer le corps d’Alvo. Ils prennent la décision de le faire à la nuit tombée. Sauf que lorsqu’ils partent avec le corps sur un brancard de fortune, c’est en plein jour, à la vue de tout le monde. Alors certes ils sont en forêt, mais le risque de croiser quelqu’un reste fort, tout de même !

La série baigne dans cette impression d’approximation constante. On a l’impression que leurs antagonistes, des malfrats qu’on imagine puissants, sont les plus stupides du monde. Si l’un d’entre eux avait juste pris le temps de surveiller ces quatre garçons, tout se réglait en deux jours. Mais non, vraisemblablement, il valait mieux les laisser libres de leurs mouvements. Des protagonistes pas très malins « poursuivis » par des antagonistes encore plus idiot, le tout dans une fiction pas si drôle que ça…

Dès le départ, « Mad Dogs » était un véhicule. Une volonté de la part de ces acteurs de trouver un projet commun pour travailler ensemble. Une intention louable mais assez bancale au final. Il leur est même passé par la tête, au départ, de raconter l’histoire d’un groupe de rock, pour finalement changer d’avis, trouvant cette idée trop cliché. Ils ont donc troqué un cliché pour un autre en s’attaquant au « film de gangster à l’anglaise ». « Mad Dogs » nous ramène 10 ans en arrière, aux débuts de la carrière de Guy Richie, à ce « Sexy Beast » qui lui ressemble tant… une œuvre passéiste, qui offre quelques morceaux de bravoure assez bien sentis, mais dont le scénario arrête d’être crédible à la cinquième minute du second épisode, pour finir dans le grotesque le plus complet.

Un scénario mal ficelé

Il est malheureux de voir que, si cette histoire est menée par ses personnages, tous les choix pris par ces derniers ne le sont que pour faire avancer l’intrigue, et pas pour se sortir de la situation. Au final, « Mad Dogs » est tout sauf un véhicule convenable pour de tels comédiens. Il ressemble plus à une bande démo (trop longue), qui expose leur immense talent et qui nous fait penser qu’on les adore, mais qu’ils ont été meilleurs ailleurs, et ce dans des histoires mieux fichues que celle-ci.

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Philip Glenister
Comparé aux autres images du bonhomme, sur celle-là il semble presque sourire

Dans le marasme ambiant de cette tentative avortée, on peut souligner la performance de Philip Glenister, qui est tout bonnement remarquable. Tout en retenue, en contrôle, en analyse. Un type déconnecté de la vie sans passion qui, sans en donner l’impression est au bord d’une explosion bien moins exubérante mais ô combien plus significative que celles de ses amis. Non pas que les autres soient moins bons, mais la constance de Glenister (mieux servi par le scénario) force le respect.

Bancale, trop peu surprenant, avec un scénario qui ne tient pas la route, « Mad Dogs » s’avère être une assez grande déception. Et ce malgré quelques bons passages, un premier épisode très solide, et peut être l’un des casting les plus alléchant de ces dernières années.

« Mad Dogs » revient pour une saison 2, tournée cet été, pour une diffusion à partir du 19 janvier sur Sky. Une saison 3 a déjà été mise sur les rails, et devrait être tournée en janvier (« Les Mad Dogs font du ski » ?). On espère juste que l’auteur principal, Chris Cole, se rapprochera plus des modèles cités lors de la sortie de la série (les frères Coen et David Lynch), et moins de ceux qu’il a copiés, peut-être inconsciemment.

Post Scriptum

« Mad Dogs »
4x52’ - 2011
Une production Left Bank Pictures / Palma Pictures pour Sky1.
Créé et écrit par Cris Cole. Réalisé par Adrian Shergold
Avec : John Simm, Marc Warren, Max Beesley et Philip Glenister.

Prochainement sur Canal+.