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Battlestar Galactica - Une diseuse de bonne aventure vient faire avancer l’intrigue

Exodus : Part One: Oracle et boules de gomme

Par Feyrtys, le 22 octobre 2006
Publié le
22 octobre 2006
Saison 3
Episode 3
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Mes dieux que cet épisode va être difficile à reviewer. J’ai pourtant l’habitude des rythmes lents, j’ai fait les reviews de la troisième saison de Deadwood. Cette série sait traiter l’absence d’événements déterminants avec un brio rarement vu à la télévision. Et pourtant, la pression monte à chaque épisode de Deadwood, jusqu’au finale. Dans cette première partie d’un double épisode nommé Exodus, l’équipe de BSG n’a pas su faire preuve du même savoir-faire que celle de Deadwood. Non seulement la pression n’atteint pas le niveau recherché, mais en plus, la série cède à des facilités scénaristiques que je vais avoir du mal à pardonner.

Je vais essayer de ne pas être trop dure avec l’épisode. Après tout, un mauvais épisode de BSG, c’est toujours cent fois mieux qu’un épisode de Lost ou de CSI. Mais j’attends tellement de cette série qu’au moindre faux pas, il m’est difficile de voir au delà des plus gros défauts.

C’est pourquoi avoir recours à une Oracle pour changer l’histoire d’Hera, et changer le personnage de D’Anna par la même occasion, me fait bondir de mon canapé. Non pas que l’Oracle soit insupportable (Amanda Plummer, méconnaissable, joue toujours aussi bien les déjantées), mais ce qu’elle révèle est beaucoup trop précis (et surtout vrai) pour être accepté par les téléspectateurs sans sourciller.
Je n’ai rien contre le fait que certains cylons soient croyants. Je n’ai rien contre le fait que la croyance principal des humains ressemble à celle des Grecs de l’Antiquité. Au contraire, tout cela me paraît très intéressant, le monothéisme contre le polythéisme, la superstition grecque contre l’ordre et le dogme de la chrétienté, ça donne un recul certain sur le plan des cylons et le rapport à la religion humaine.
Mais recourir à la voyance pour lancer D’Anna dans la quête du bébé humon (mi-humain mi-cylon), c’est non seulement trop facile, mais en plus, c’est énervant.
Non, Ron, je ne trouve pas ça drôle que la chrétienne D’Anna se retrouve dans la tente d’une Oracle, personnage païen par excellence. Les Oracles, c’était déjà pas terrible dans Matrix (oh et en plus elle est aveugle, mazette qu’est-ce qu’on va pouvoir piquer à la tragédie grecque après ça ?), mais dans BSG, ça ne prend pas du tout.

On peut parler de destin sans passer par la case « oracle qui révèle tout », on peut être épique sans sombrer dans le mysticisme et les pouvoirs de prescience. Les cylons ont beau être croyants, je n’ai jamais pensé qu’ils bénéficiaient d’un quelconque don de voyance. Quand Leoben est emprisonné en saison une, il manipule davantage qu’il ne prophétise. Il est celui qui maîtrise la psychologie humaine et qui en tire parti en faisant croire à Laura qu’il connaît l’avenir, pour mieux insinuer le doute en elle et la manipuler.

Quand Laura a des visions, j’aime avoir la possibilité de mettre ça sur le dos des drogues qu’elle prend contre son cancer. Donnez-moi le choix entre le scepticisme et la foi, et je choisirai toujours le scepticisme. Mais par pitié, laissez-moi le choix ! Ne me mettez pas en face d’une femme qui révèle absolument tout, dans les moindres détails, de l’histoire du bébé humon ! Donnez-moi une D’Anna qui doute, qui est torturée par l’idée que l’enfant de Sharon est toujours en vie, et qui se met à faire une enquête sur les conséquences de sa mort. Mais arrêtez tout de suite avec la D’Anna qui rêve de la tente de l’Oracle... Je n’ai aucune envie d’imaginer qu’un pouvoir plus grand que les humains et les cylons soit en marche.
J’ai détesté Laura dans ses moments « je suis l’incarnation d’une prophétie et je trouverai la Terre », et elle ne trouvait grâce à mes yeux uniquement parce qu’Adama contrebalançait ses penchants déliro-mystiques. Quant à la découverte de Kobold et de la route vers la Terre, j’ai préféré mettre ça sur le dos des premiers colons et de leur sens de l’humour particulier ; voilà comment j’imagine le brainstorming des premiers colonisateurs humains :

« Ah ouais, trop cool, on va faire comme dans Les Mystérieuses Cités d’Or, on fabriquera des clés compliquées avec des objets symboliques qu’on dira qu’ils sont divins !! J’suis sûr qu’il y aura des hommes assez stupides dans l’avenir pour croire qu’on était des dieux en fait ! Raoul, elle s’appelait comment déjà la fille aux cheveux violets dans Les Chevaliers du Zodiaque ? »

Je crois que j’ai été assez claire : recourir au mysticisme sans laisser au téléspectateur la possibilité de choisir une autre explication est une très mauvaise idée.
Je trouve ça très bien que les cylons se remettent à la recherche du bébé de Sharon et d’Helo. Je trouve très intéressant d’avoir fait de D’Anna le personnage central de cette quête. Ce que j’ai du mal à digérer, c’est de devoir imaginer qu’un pouvoir supérieur se soit adressé à l’Oracle et à D’Anna dans ses rêves. Et que dans une tirade ridicule, l’Oracle crache le morceau à la cylonne à propos de l’existence d’Hera (et tu veux pas donner le code postal de la mère adoptive tant que tu y es ?). C’est trop facile. Je crois qu’il aurait été possible de faire croiser le destin de D’Anna et d’Hera autrement que par le biais d’une diseuse de bonne aventure. Et je suis bien navrée que l’équipe de BSG ait cédé à cette facilité d’écriture.

Voilà mon plus gros problème avec cet épisode.

Ensuite, le fait qu’il ne se passe absolument rien et que la pression peine à monter, sont mes deux autres principaux reproches.

C’est bien simple, Ron D. Moore n’a tellement rien à dire sur cet épisode qu’il a passé son temps à parler des épisodes à venir sur son podcast. Et merci beaucoup pour les spoilers, Ron, merci. Je t’ai maudit à jamais, sache-le.

On apprend peu de choses intéressantes dans ce podcast d’ailleurs, si ce n’est qu’à l’origine, le personnage de Jammer devait être tué lors de l’épisode, alors que la Résistance sauvait les deux cent prisonniers condamnés à mort. Au bout du compte, les scénaristes ont préféré garder Jammer en vie. Et je trouve ça plus intelligent également, car les situations à venir vont soulever des questions sur les actions de Jammer et la façon de juger ces actions. J’ai hâte de voir ce que ça va donner.

Voilà pour l’information intéressante du podcast. J’y ai appris également que la femme de Ron D. Moore ne comprend rien à rien à l’histoire de BSG et que vraiment, si c’est pour faire des commentaires aussi plats, je préfère encore l’entendre manger de la glace dans un bol comme dans l’avant-dernier podcast. En fait, pour dire la vérité, je préfèrerais ne pas l’entendre du tout.

Pour les morceaux réussis de l’épisode, nous avons, dans l’ordre d’apparition : Baltar et N°6 au lit, et les problèmes d’impuissance de ce cher Président de Colonies. Non, ce n’est pas vraiment le fait que Gaius ne puisse pas avoir d’érections qui m’intéresse, c’est surtout le fait que N°6 reste avec lui malgré tout, malgré la dépression et l’impuissance... Ils sont dans une vraie relation. Ils ont dépassé la période euphorique des débuts en somme (oh j’apparais dans ta tête et je te fais des choses sexuelles) pour évoluer vers une relation plus aimante et plus adulte en même temps : Baltar est toujours amoureux de N°6, malgré l’odieuse occupation des cylons sur New Caprica, et N°6 continue à aimer Baltar même s’il est au bord du suicide. Ils s’aiment. Ils forment un vrai couple, ils sont loin des apparitions impromptues et des relations imaginaires. Ils sont ensemble envers et contre tous, et ce n’est pas juste une expression : ils sont ensemble envers et contre leurs propres races.

Ensuite, nous avons un autre point intéressant, qui donne des informations précieuses sur les cylons (enfin de mon point de vue, toute information sur le fonctionnement des cylons est très précieux). Il s’agit du moment dans lequel le modèle Cavil explique à ses camarades cylons qu’à chaque réincarnation, il trouve l’épreuve de plus en plus difficile, physiquement et peut-être, pouvons-nous penser, psychologiquement.
Comme le dit Ron dans son podcast, vous ne pouvez pas expérimenter la mort sans en payer le prix. Plus les cylons se réincarnent, plus les effets secondaires se font ressentir. Car rappelons-le : dans une volonté de se rapprocher le plus possible de la condition humaine, les cylons connaissent et expérimentent les mêmes douleurs physiques que les hommes. Si les réincarnations sont de plus en plus douloureuses, les cylons reverront peut-être leur plan... Leur perception du Monde en changera peut-être. Car l’immortalité est la caractéristique principale des cylons, celle qui les différencie des humains.

La dernière scène marquante de cet épisode est celle qui voit se confronter D’Anna et Sharon. D’Anna révèle à cette dernière que son bébé est toujours vivant... Mais Sharon refuse de croire qu’Adama lui mentirait. Dans mes souvenirs, mais j’ai peut-être la mémoire qui flanche, il me semble qu’Adama ne sait rien de la décision de Laura de mentir à Sharon et de lui faire croire que son bébé est mort...
En tout cas, je suis ravie que Sharon soit restée sur le Galactica et qu’elle soit devenue l’amie d’Adama. Je trouve son évolution essentielle à l’histoire qui lie les humains aux cylons. Sans elle, sans Caprica 6 et Boomer, il serait difficile de voir les cylons autrement que comme des machines sophistiquées qui cherchent à anéantir l’humanité.

La mission de sauvetage est sur le point d’être lancée, mais je n’ai ni peur pour Adama, ni pour les résistants sur New Caprica. En fait, je me demande surtout comment ils vont se débarasser de Kara et de la gnome qui lui sert de gamine. C’est ma plus grande inquiétude à la fin de cette première partie.

Feyrtys
P.S. Cet épisode est donc une introduction à la tentative de sauvetage que l’on verra dans la deuxième partie. Je comprends qu’il va y avoir beaucoup à raconter, beaucoup à montrer, mais en même temps, cette première partie m’a paru quelque peu inutile. Pas complètement futile, mais beaucoup trop longue et bien trop dénuée de tension pour remplir son contrat d’introduction.