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On Freddie Roach - De la télé-réalité, du HBO, et de la Boxe

On Freddie Roach: The Real Coach Taylor

Par Jéjé, le 9 mars 2012
Par Jéjé
Publié le
9 mars 2012
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En retard sur pas mal de séries, je me suis dit il y a quelques jours que ce serait sûrement une bonne idée de me mettre à une série documentaire dont la diffusion est déjà terminée…

Qu’est-ce que c’est ?

De la télé-réalité.
Sur de la boxe.
Produite par HBO.
Et dont les six parties d’une demie-heure ont été diffusées les vendredis soirs de janvier et février dernier, avant l’émission de Bill Maher.

Qu’est-ce qui m’a pris de regarder ça ?

Malgré tout mon intérêt pour la télé-réalité, j’ai la boxe en telle horreur que je n’avais même pas eu l’idée de jeter le moindre coup d’oeil en 2005 à The Contender, émission pourtant créée par Mark Burnett, le papa du Survivor américain, lancée sur NBC (et récupérée ensuite par ESPN), et sorte d’A la recherche de la nouvelle star de la boxe. [1]
Et HBO ou pas HBO, il n’y avait (apparemment) aucune raison pour que ma position change et que je me retrouve à suivre la vie d’un entraîneur amércain dont je n’avais évidemment jamais entendu parler.

Mais, comme vous vous en doutez, il y en a eu une, de raison.
Et elle s’appelle Friday Night Lights.
Ou plutôt Peter Berg.
Mais quand on associe : Peter Berg + Sports + Entraîneur, des connections se font assez rapidement et l’on se dit que l’on va pouvoir dépasser ses a priori initiaux.

Ca parle de quoi ?

De Freddie Roach...
Qui pour les fans de boxe aux Etats-Unis est l’équivalent de Coach Taylor pour les habitants de Dillon, Texas, une sorte de prophète moderne dont les moindres mots sont écoutés avec l’attention la plus déférente.
C’est assez impressionnant la ferveur qui anime ceux qui s’approchent de lui dans les premières minutes de la série.
Immergé directement dans le quotidien de l’homme, sans voix-off, façon "Cinéma Verité" (ou Real Housewives, ça dépend des références), les grands novices de ce milieu comme moi doive faire sans une petite biographie introductive.
Direction donc Wikipedia où l’on apprend qu’ancien boxeur, Freddie Roach, a connu la gloire comme entraîneur. Il a commencé avec Mickey Rourke dans les années 90 (ami de Peter Berg, ceci explique cela) avant de former/entraîner/fabriquer des dizaines de champions du monde.
Et a remporté quatre fois le titre de "Meilleur entraîneur de l’Année" par l’association des journalistes de boxe.

Et c’est bien ?

Après trois épisodes, je n’ai toujours pas d’avis définitif sur la question.

Sur la forme, l’étiquette Peter Berg tient toutes ses promesses. Dans le premier épisode, on assiste assez vite à une scène d’entraînement à la lumière tombante du crépuscule sur une musique atmosphérique [2].
Une grande partie du troisième épisode est consacrée à une séquence qui pourrait être tirée directement de Friday Night Lights.
Dans une salle de conférence du centre olympique, une jolie psychologue tente un exercice de préparation mentale avec un parterre de grands gaillards peu motivés et Freddie Roach lui-même. Elle leur demande de visualiser, les yeux fermés, une orange. De s’imaginer en train de la peler, puis de mettre un morceau dans leur bouche, de sentir le jus sur leur langue. L’hilarité gagne la salle, même Freddie sourit. Quelques-uns restent concentrés. Elle demande alors à tous de fermer à nouveau les yeux. D’imaginer un vestiaire quelques minutes avant un match très important. Elle décrit les odeurs, les sensations. L’épisode insère des images de couloirs, de ring, de public... Tout le monde joue le jeu. Parmi eux, Freddie a des traits détendus. On peut imaginer qu’il s’offre un voyage personnel dans ses souvenirs.
Tout le savoir-faire émotionnel de Peter Berg surgit dans cette séquence.

Quand elles concernent le sport ou les relations familiales, comme dans la série, c’est superbe.
Le même traitement est appliqué à ce qui entoure la maladie de Parkison, dont souffre Freddie Roach et qui constitue un thème majeur de la série.

Et c’est dans ces eaux-là que je situerais le bémol qui m’empêche de m’enthousiasmer complètement. Et encore…

Dès le départ, ses tremblements sont montrés, le premier épisode se conclut sur Freddie Roach à l’hôpital, qui évoque une journée plus difficile que les autres, le troisième s’ouvre sur une série de tests, dans un autre hôpital, et le diagnostic de son neurologue sur l’évolution de la maladie. Le souci de santé majeur des boxeurs, et celui de Freddie Roach en particulier, n’est ainsi pas minimisé.
Certes, l’esprit filmique de Peter Berg n’est pas celui de la polémique ou de la dénonciation sociale. Mais ce n’est pas un problème en soi, puisque avec les données apportées par la série, le spectateur se rend bien compte des dégâts neurologiques que la pratique de la boxe à haut niveau cause aux sportifs et « accessoirement » que leur recrutement se fait parmi les couches les plus défavorisées de la population américaine, à l’époque de Roach comme maintenant.
Sur le moment, j’ai pu trouver gênantes les scènes dans lesquelles Roach en évoquant sa maladie explique que même s’il avait connu les risques, le jeu en aurait valu la chandelle ou bien, cette autre, où aux côtés de comparses boxeurs tous atteints de Parkinson, il raconte que Mohamed Ali donne une mauvaise image de la boxe parce qu’il ne suit pas bien ses traitements…
Mais, à nouveau, je ne me suis pas senti forcé par On Freddie Roach d’adhérer à ses propos, c’est l’un des avantages de la pseudo-objectivité du dispositf « cinéma-vérité » (même si on est bien d’accord tout montage implique la création d’un discours).

Ca fait tout de même de jolies photos

En fait, mon véritable souci est causé par l’identité du diffuseur et producteur de « On Freddie Roach » , HBO, en l’occurrence.
Qui a bâti pour partie son succès financier initial sur la diffusion des matchs de boxes, sport qui continue à être un argument de vente pour ses abonnements.
Je trouve ça tout de même bien cynique de faire de l’argent avec un sport et de tenter d’en faire encore un peu plus (ou en tout de cas de s’acheter une sorte de bonne conscience) en en montrant ses graves dangers. À l’instar des organisateurs du match de boxe du premier épisode qui font intervenir en préambule de la conférence de presse un neurologue pour présenter l’évolution des études concernant les maladies neurologiques qui touchent les boxeurs.
D’autant plus que ceux que l’on envoie s’étriper sur des rings et se détruire le cerveau pour l’amusement des autres font partie des plus pauvres de la population.

Mais vaudrait-il mieux que cette série n’existe pas ?

Je ne crois pas…

Au final, je vais plutôt regarder les DVD de Friday Night Lights ou rattraper mon retard sur la saison 2 de Spartacus, j’aurais ma bonne petite conscience avec moi !

Jéjé
Notes

[1Je n’avais pas non plus chercher à regarder Light Out l’année dernière sur FX pour les mêmes raisons.

[2La Bande Originale de la série utilise la musique des Antlers, groupe de rock qui a assuré des premières parties de concert d’Explosion in The Sky...