Malheureusement, pour certains fans de ces séries il n’y en a jamais assez.
Oui, 88 épisodes et une mini-série sont amplement suffisants, quoiqu’en disent les fans de Farscape ! Après Sit Down, Shut Up et Running Wilde, je ne suis pas sûr de vouloir une suite à Arrested Development. On l’a eu, notre film Serenity. Et quinze ans après, on ne l’aime plus trop, Claire Danes.
Cet été, Mégalopolis vous propose une liste de quatre séries qui se suffisent à elles-même, dont on n’attend ni films réunions, ni édition DVD collector, mais qui présentent un réel intérêt et dont l’intégrale fera plus que simplement vous aider à patienter sagement jusqu’à la rentrée.
Boomtown

Entre la fin de NYPD Blue et les débuts de Southland, les séries policières ont eu la vie dure à la télévision US. D’un côté on avait les flics corrompus de The Shield ou l’ultra réalisme de The Wire, de l’autre la vision très particulière des galaxies Law & Order ou CSI.
Malgré une tentative de retour, la saison passée, avec des séries comme Detroit 1-7-4 ou The Chicago Code, l’une des rares séries policières traditionnelles à s’être aventurée sur les ondes fut Boomtown en 2002 de Jon Avnet et Graham Yost (Justified).
La particularité de Boomtown réside dans sa narration. À la manière de Rashomon, chaque épisode nous est montré sous le point de vue de chacun des personnages principaux, à savoir un assistant du procureur, une journaliste, deux policiers, deux inspecteurs, une ambulancière et ceux de l’intrigue de la semaine. Ainsi, certaines scènes nous sont montrées plusieurs fois sous des angles différents, mettant le téléspectateur dans le rôle de l’unique personnage à avoir la vision globale de la situation. Visuellement, placer le téléspectateur au centre de l’intrigue se traduit par des plans serrés, sur des acteurs qui semblent parler directement à la caméra.
Cette idée de base est brillante, mais sa rigidité peut montrer rapidement ses limites en entraînant une certaine répétition, ou en tordant son intrigue afin qu’elle respecte les règles fixées au début de la série. L’originalité de Boomtown est que chaque épisode réussit à garder son identité propre malgré l’utilisation du même schéma narratif, et cela grâce à l’ingéniosité des scénaristes qui se permettent de jouer un peu avec leur audience. Une révélation en début d’épisode peut s’avérer être une fausse piste, car ce n’est qu’à la fin de l’épisode que toute la vérité est révélée au spectateur.
Certains épisodes choisissent de ne pas montrer l’intrigue dans l’ordre comme le 104, Reeling In The Years. Le spectateur peut alors spéculer sur la manière dont les pièces du puzzle s’assemblent. Dans le même épisode, on plante quelque indices dans le décor. Ainsi lorsque Teresa (Lana Parilla) et Joel (Donnie Walhberg) se croisent au café, Fearless (Mikelti Williamson) apparaît brièvement en arrière plan, disparaît et appelle son partenaire au téléphone. L’explication n’est donnée que quelque minutes plus tard, dans un épisode déjà particulièrement dense.
L’autre difficulté que la production doit gérer est l’utilisation de sa large distribution. Surtout que chaque épisode donne la part belle aux guests de l’intrigue principale, ce qui nous donne l’occasion de revoir, entre autres, Dan Byrd de Cougar Town, Miguel A Nunez de L’Enfer du Devoir, Patricia Wettig d’Alias ou Michael Munhey de Veronica Mars. Les scénaristes doivent trouver des moyens pour impliquer toute la distribution.
Il n’y a pas trop de problèmes pour les hommes de la distribution qui, en tant que policiers, inspecteurs et assistant du procureur, rentrent naturellement dans l’intrigue de la semaine. En revanche, pour Andrea la journaliste (Nina Garibaris) et Teresa l’ambulancière (Lana Parrilla), le problème est plus épineux.
Ceci est flagrant dès le deuxième épisode de la série, Possession. Andrea semble n’être présente organiquement dans l’histoire qu’à travers sa liaison avec MacNorris (Neal McDonough). Et on ne me fera pas croire que la présence de Doofus lors de la course poursuite n’était pas uniquement un moyen de donner un peu de texte à Lana Parilla. Ces difficultés seront plus ou moins bien gérées selon les épisodes, mais les scénaristes en tireront des conclusions lors de la très courte seconde saison.
Après un renouvellement surprise, la production de la seconde saison de Boomtown a été interrompue après une poignée d’épisodes pour finalement être annulée. Et oui, Southland n’aura pas été la seule série bernée par NBC. Malgré un premier épisode assez déstabilisant qui voit l’arrivée de Vanessa Williams et une redéfinition peu crédible du personnage de Teresa, elle vaut la peine qu’on s’y attarde.
Mais même sans cela, la première saison de Boomtown se suffit à elle même, comme le montre l’ultime clin d’œil qui lie le dernier épisode de la saison au tout premier plan de son pilote.
Hot Properties

La production télévisuelle US est faite de hasards douteux. Ainsi, souvent, avec chaque nouvelle saison, vient son duo de séries possédant des thèmes similaires. D’Urgences et Chicago Hope à Once Upon a Time et Grimm en passant pas Kidnapped et Vanished, les exemples sont nombreux.
Avec moins de scrupules, les chaines US ont toujours cette volonté d’émuler les succès actuels des networks concurrents. Avec plus ou moins d’ambition, on essaie de reproduire les séries à succès du moment. Cette saison, deux networks se sont essayés à du Mad Men pour grand public avec The Playboy Club et Pan Am avec la réussite qu’on leur connaît.
Mais quelque chose de bon peut parfois sortir de ces versions « light ».
Ainsi, sans The X-Files, NBC n’aurait peut-être pas cédé à la vague des séries parano-SF, et n’aurait sans doute pas développé Le Caméléon. Ju n’aurait alors jamais eu l’élément déclencheur de sa passion pour les séries, et vous seriez en train de lire pErDUSA, le site de référence français sur les collections de timbres hongrois, l’autre grande passion de Ju.
Avec le succès de Sex and The City, des Carrie Bradshaw du pauvre sont apparues sur nos écrans. On s’est dirigé vers la dramédie avec Cashmere Mafia et Lipstick Jungle, avec peu de succès et encore moins d’intérêt. En revanche, ABC, en 2005, s’est essayé à une version sitcom avec des couleurs qui font mal aux yeux et rires en boite. La série n’aura pas marqué les esprits et pourtant c’est bien dommage car Hot Properties était un peu plus qu’un erztas de Sex and The City. [1]
ABC avait confié cette mission à Suzanne Martin, et la dame s’y connaît un peu en sitcom puisqu’elle était déjà derrière Designing Woman. [2]
Si tout se passe comme prévu, vous devez sûrement être en train de vous demander où réside l’intérêt de regarder l’adaptation d’une série insupportable par une scénariste du troisième âge que personne ne semble connaître. Et c’est là que réside la raison pour laquelle une sitcom girlie méconnue figure sur cette liste : Nicole Sullivan.
Nicole Sullivan est une femme qu’on a beaucoup aimé chez pErDUSA. Elle nous faisait rire dans Mad TV quand peu de choses nous faisaient rire dans Mad TV. Même en tant que simple guest, son rôle nous a marqué dans Scrubs. Dans Hot Proporties, elle incarne la rousse d’un quatuor d’agents immobilier des quartiers huppés de Manhattan. À ses côtés, on retrouve Gail O’Grady post NYPD Blue, Sofia Vergara pré Modern Family et Amy Hill dans la rôle de la jeune ingénue.
Évidemment, à ses débuts, il fallait s’en douter, le matériel semble être écrit pour une série qui aurait dû être diffusée dix ans plus tôt. Mais on passe un bon moment, principalement, grâce à Sullivan. Elle a ici le rôle qu’elle est habituée à jouer, la fille sympa, malheureuse en amour mais douée dans la répartie. Elle arrive parfaitement à porter la série sur ses épaules le temps que les scénaristes arrivent à trouver leur groove.
Après quelques épisodes, ils y parviennent, et les personnages sont mieux définis. Les forces des actrices qui ne sont pas Nicole Sullivan sont découvertes... quand elles en ont. Dans le cas de Gail O’Grady, les scénaristes de la série ne sont pas de faiseurs de miracles. Hot Properties a surtout présenté Vergara au grand public, des années avant les producteurs de Modern Family. Elle commence à nous agacer maintenant, mais il y a sept ans elle nous a fait beaucoup rire avec cette sitcom, dans un rôle similaire à celui qu’elle tient actuellement dans la comédie phare d’ABC.
Au fur et à mesure que les épisodes défilent, un véritable esprit d’équipe s’installe, et les deux hommes de la distribution, Stephen Dunham et Evan Handler, sont de mieux en mieux intégrés aux intrigues. La série s’achève avec son meilleur épisode, qui sans nous faire regretter l’annulation de la série, est une excellente conclusion à cette sitcom.
Cambridge Spies

Du monde l’immobilier de luxe à Manhattan, on part dans la patrie du bon Docteur pour la série suivante. Après une ultime saison de Spooks baignant dans une ambiance Guerre Froide, c’est le moment idéal pour se plonger dans Cambridge Spies, une mini série sur la vie de quatre agents doubles en Angleterre. Oui, parce que de James Bond à The Hour, en passant pas Tinker, Soldier, Tailor, Spy, les britanniques aiment leurs espions autant qu’ils aiment leur thé, leur famille royale et Benny Hill.
Diffusée en 2003 sur la BBC, Cambridge Spies de Peter Moffat est inspirée de faits réels qui ont choqué le Royaume-Uni lors de leur révélation. Pendant la montée du fascisme en Allemagne, quatre étudiants de Cambridge sont recrutés par Moscou afin de devenir des espions à la solde des communistes. Les quatre épisodes de la mini-série commencent avec leur recrutement puis suivent la vie des quatre hommes, au fur et à mesure qu’ils intègrent des postes haut placés dans la société britannique.
Nous sommes bien loin d’une ambiance à la Spooks, ici. Il n’y a pas de super gadgets ou de missions excitantes. Malheureusement, tout comme dans Spooks, on n’échappera pas à Rupert Penry Jones, la réponse anglaise à Michael Vartan, que les anglais aiment mettre un peu partout dans leurs programmes. Comme la Marmite, leur intérêt pour cet acteur est quelque chose que je ne pourrais jamais comprendre.
Bref, Ruppy mis de côté, ce n’est pas tant l’excitation de la vie d’agents doubles qui nous est montrée dans Cambridge Spies mais le dilemme de quatre hommes face à leurs idéaux et à leur choix. Il n’y a pas de manichéisme primaire ou d’idéalisation. La série surprend par la simplicité des motivations fascinantes de ces quatre hommes qui aimaient leur patrie. On ne nous montre pas des hommes qui ont simplement choisi de trahir leur pays, mais, en adhérant à l’idéologie communiste, des hommes qui cherchent à combattre activement le fascisme et l’oppression à leur manière.
Au fil de la série, le monde autour d’eux change. Et puisque plusieurs années s’écoulent entre chaque épisode, le monde change très vite. On passe alors de la lutte contre le fascisme, à la montée des tensions en Espagne, à la réalité de la Seconde Guerre Mondiale en France, pour finir en pleine Guerre Froide. Les motivations et les enjeux ne sont plus les mêmes et l’ennemi change aussi entre le premier et dernier épisode de Cambridge Spies. La seule constante est la force des liens qui lient ces quatre hommes, unis par un idéal et un dilemme qu’eux seuls peuvent comprendre. Le point fort de la série est de voir comment, et si, cette amitié résiste à l’Histoire.
Si, comme l’avertissement avant le premier épisode l’explique, des faits ont été revus, simplifiés (on oublie le cinquième homme du fameux Groupe de Cambridge), et des personnages créés de toutes pièces, cette mini-série résonne encore plus car il s’agit d’une histoire vraie qui a marqué les esprits outre-Manche. Par conséquent, on évitera de bouquiner des livres d’Histoire avant la découverte de la série, si on ne veut pas être exposer à des spoilers malvenus.
Wonderfalls

Je n’ai aucune confiance en Bryan Fuller. En quittant précipitamment Dead Like Me, il a condamné sa série après uniquement une poignée d’épisodes à l’antenne. Son retour dans Heroes a fait l’effet d’un pétard mouillé, et la seconde saison de Pushing Daisies nous a fait nous demander pourquoi on avait tant aimé la série au départ.
Aucune confiance, vous dis-je.
Mais au milieu de toutes ces déceptions, le type a fait une chose de bien. Il a convaincu le chanteur de XTC de signer le fantastique générique de Wonderfalls. Heureusement, la série est à la hauteur du générique, mais j’imagine que c’est sûrement grâce à Tim Minear (Angel, Firefly) et Todd Holland (Malcolm In The Middle).
Dans Wonderfalls, Jaye Tyler (Caroline Dhavernas) est une jeune diplômée en philosophie désabusée, sans aucune motivation dans la vie, qui travaille dans un magasin de souvenirs aux Chutes du Niagara et vit dans une caravane. Un jour, des objets inanimés commencent à lui parler de façon cryptique. Ces lions de cire, statuettes de singe, ou ces caméléons en peluche, la forcent à faire ce qu’elle déteste le plus : entrer en contact avec le monde qui l’entoure.
La qualité principale de la série ne réside pas uniquement dans son gimmick mais dans la personnalité si particulière de son personnage principal. Wonderfalls, comme le souligne l’épisode Karma Chameleon est une série symbole de sa génération, celle qui a grandi dans les années 90. Jaye Tyler a la répartie d’une Daria et comme Angela Chase, elle semble vivre en marge du monde qui l’entoure. Pour elle, comme un pour un Jim Halpert des débuts de The Office, l’ambition est un vilain mot.
Les 13 épisodes de Wonderfalls confrontent Jaye à l’image qu’elle envoie d’elle-même et à ses contradictions. Elle n’a aucun intérêt dans son travail, mais prend très mal la promotion de son collègue. Elle accepte la simplicité de sa vie mais éprouve de la jalousie envers ses frères et sœurs lorsqu’ils sont sujets d’une description élogieuse dans le livre de leur mère. Ainsi, en plus de la forcer à interagir avec ses proches et le reste du monde, elle n’a de cesse de se justifier et d’expliquer qui elle est vraiment. Ce qui devient nécessaire lorsque ses amis et sa famille notent un changement en elle, sans savoir qu’elle suit à contrecœur les instructions à la fois précises et peu compréhensibles des muses qui l’entourent.
En plus de cela, Dhavernas excelle dans un rôle qui aurait pu facilement être un personnage détestable aux mains d’une autre. Et elle est au centre d’une distribution tout aussi talentueuse où chaque acteur apporte quelque chose à son rôle. Du coup, on a du mal à comprendre ce que le directeur de casting a pu voir en Tyron Leitso, un sous Matthew Fox canadien (c’est pour dire à quel point la barre est haute).
Et c’est bien dommage.
On prend du plaisir à voir un dîner de famille des Tyler quand on sait que cela signifie plus de temps d’antenne pour Diana Scarwid, Katie Firnerman, Lee Pace et William Saddler, et nous sommes heureux de voir Tracie Thoms prendre de l’importance au fur et à mesure que la série avance. En revanche, il est difficile de s’intéresser à Eric tant son interprète parait tellement fade face au reste du groupe. Et c’est un sérieux problème quand il s’agit du premier rôle masculin de la série. Tout l’aspect romantique est bien en deçà du reste.
Mais c’est le seul défaut de la série. Treize épisodes, c’est parfait pour Wonderfalls. Plus, et la série aurait sûrement suivi le chemin de Pushing Daisies et Dead Like Me : la suite m’aurait rétroactivement empêché d’apprécier ses débuts réussis. Je pense que c’est l’unique raison pour laquelle Wonderfalls est le seul coffret DVD d’une série de Brian Fuller que je n’ai pas encore revendu.
[1] En même temps, je dis ça, mais je n’ai du voir que tout juste assez d’épisodes de Sex and the City pour en être vacciné à vie.
[2] Bon, j’avoue, moi non plus je ne connais pas cette sitcom qui avait l’air d’être connue à la fin des années 80, mais il y avait Jean Smart dans la distribution, donc ça devait sûrement être très bien et très drôle.